Rencontre avec un homme hideux

David Foster Wallace / Rodolphe Congé

Théâtre
coproduction
19avr>22avr
[au théâtre Garonne]
billet
mercredi 19 avril 2017 / 20:00 / 1h15
jeudi 20 avril 2017 / 20:00 / 1h15
vendredi 21 avril 2017 / 20:00 / 1h15
samedi 22 avril 2017 / 20:00 / 1h15

"Il faut aller voir Rodolphe Congé, pétrifié dans sa chaise, assumer chaque mot, chaque silence, chaque hésitation de ce narrateur, assumer sa quête au point de se confondre avec lui, au point qu'on se met presque à le haïr d'être à ce point infamant, séduisant, répugnant, émouvant." Joëlle Gayot

L’odyssée flippante d’une auto-stoppeuse enlevée par un tueur en série, une histoire d’amour aussi dévorante qu’inattendue, et (presque) une rédemption : il y a tout ça dans la brève nouvelle de David Foster Wallace, que Rodolphe Congé adapte pour le théâtre. Tout ça, et aussi, au cœur de ce récit dialogué, beaucoup de trous, ellipses, non-dits, qui deviennent pour le lecteur, et plus encore le spectateur, autant de blancs à combler, où l’imaginaire de chacun pourra se lover, stimulé par les sons et la lumière de Daniel Jeanneteau.
Car Rodolphe Congé, acteur pour Alain Françon sur les planches ou pour Pierre schoeller à l’écran, et par ailleurs complice de Joris Lacoste (qui du reste participe à l’aventure), sait que les suspensions silencieuses disent parfois plus que les mots. Il envisage donc ici le théâtre comme une machine à fantasmes, et le public comme un créateur à part entière : avec la ferme conviction – et c’est tout le pari de ce spectacle – que la richesse émotionnelle du texte de Wallace deviendra, par la grâce de la scène, une puissante expérience intérieure.
 

"Ponctué de silences émaillés de brefs signaux sonores (musique de Pierre-Yves Macé), le discours du conteur désinvolte, volontiers agaçant, confine probablement à la demande d’amour feutrée. L’acteur se livre ici, dans le registre du « neutre » élégant, à une parfaite démonstration de théâtralité a contrario, en homme qui parle pour dire beaucoup mine de rien. Il y va d’un art du peu qui réhabilite suavement les mots, la parole enfin dans toutes ses virtualités suggestives, pour le plaisir de l’intelligence à partager en toute complexité." L'Humanité, Jean-Pierre Léonardini

The frightening odyssey of a hitchhiker kidnapped by a serial killer, an all-consuming and unexpected love, and a (quasi) redemption: all of this is present in David Foster Wallace’s short story which Rodolphe Congé adapted for the theatre. All of this, and also, at the heart of this narrative focusing on dialogue, a lot of holes, of ellipses, of things left unsaid, which become for the reader, and all the more strongly for the spectator, so many blanks they have to fill, where each person’s imagination can curl up, stimulated by the sounds and lights created by Daniel Jeanneteau.
Indeed, Rodolphe Congé, who acted for Alain Françon on stage and for Pierre Schoeller on screen, and is also an associate of Joris Lacoste (who is taking part in the adventure here), knows that the silent pauses are sometimes more telling than words. In this play, he presents theatre as a machine to create fantasies, and the audience as one of the creators: strongly convinced – and this is the gamble that the play makes – that the emotional wealth of Wallace’s text will become through the grace of the stage a powerful internal experience.

texte David Foster Wallace
proposition et jeu Rodolphe Congé
adaptation pour la scène Rodolphe Congé, Joris Lacoste, Julie Etienne, d’après la traduction de Julie et Jean-René Etienne parue aux éditions Le Diable Vauvert
collaboration artistique Joris Lacoste 
musique Pierre-Yves Macé
scénographie Daniel Jeanneteau
lumières et régie générale Eric da Graça Neves
assistanat mise en scène Laura Bazalgette
production lebeau & associés
coproduction Théâtre de la Cité Internationale ;
Festival d’automne à Paris ; théâtre Garonne - scène européenne, Toulouse

création en octobre 2016, au Théâtre de la Cité Internationale, dans le cadre du Festival d’Automne à Paris

  • de 9 à 24€

Rodolphe Congé envisage son métier dans sa globalité, qu’il interprète une pièce expérimentale ou un classique. 
Animé d’une volonté de trouver un jeu présent et concret pour « s’éloigner de l’émotion frelatée ou de la déclamation », il mène une réflexion sur sa pratique depuis ses études au conservatoire de Bordeaux puis au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique où il a été marqué par les enseignements d’Alain Françon, Klaus Michaël Grüber et Dominique Valadié. Parmi ses « maîtres », il cite aussi le comédien Jean-Yves Dubois, aujourd’hui disparu, pour sa capacité à faire un montage entre des effets de réel et des effets lyriques « sans qu’on voie les coutures », et le cinéaste Philippe Garrel qui lui a fait comprendre que le théâtre était « un jeu de cinéma avec extension ». Fidèle à Alain Françon, Noëlle Renaude, ou Gildas Millin, il alterne cinéma et théâtre avec une préférence pour la scène et un goût pour les exploitations longues. Cette année il met en scène le texte d’un jeune auteur, Nicolas Doutey, et reprend en tournée son rôle dans le Canard Sauvage d’Ibsen, créé l’an dernier à la Colline, en attendant de se plonger complètement dans la langue de Foster Wallace « cette langue qui évoque l’oralité mais qui n’en est pas du tout : cela s’appelle un style et c’est pour cela que c’est possible au théâtre ».

David Foster Wallace est né à Ithaca dans l'État de New York en 1962 et sa famille a vécu dans un petit village de l'Illinois nommé Philo : il a raconté son adolescence dans cette région dans Un truc soi-disant super auquel on ne me reprendra pas (A Supposedly Fun Thing I'll Never Do Again). Il réussit de brillantes études au Amherst College dans l'État du Massachusetts couronnées par une thèse de philosophie en 1985, sur la logique modale et les mathématiques. Il obtient ensuite un Master of Fine Arts (MFA) en creative writing à l'Université d'Arizona en 1987. Il s'engage alors dans la carrière professorale à l'Université de l'Illinois et parallèlement écrit ses premiers textes littéraires qu'il publie dans différents magazines. En 1991, il commence son roman Infinite Jest qui sera publié en 1996. En 2002, il s'installe en Californie et enseigne au Pomona College à Claremont et épouse Karen L. Green en 2004, poursuivant avec succès une activité d'écrivain, de journaliste et de professeur. Souffrant depuis plus de vingt ans d'un état dépressif qui s'était aggravé dans les derniers mois, il se suicide par pendaison le 12 septembre 2008 à l'âge de 46 ans.