FEMMES EN SCÈNE, PARTAGE D’EXPÉRIENCES

Ligne de crête / ©Compagnie-Maguy-Marin

expérimentations / conversations

Artistes, productrices, metteuses en scène, scénographes, comédiennes, danseuses, chorégraphes, techniciennes… Les femmes investissent aujourd’hui tous les métiers de la scène, ici ou ailleurs. Et pourtant, elles restent très minoritaires sur les plateaux.
De ce constat est né le projet Femmes en scène, partage d’expériences.

Il consiste en la mise en place d’actions spécifiques en direction d’un public exclusivement composé de femmes, avec des artistes accueillies à Garonne au fil des saisons, autour des différents métiers de femmes invitées : voix, danse, théâtre, création sonores…

Le programme de la 3ème édition 20-21 est en cours de préparation !

Annulation…
Atelier pratique sur le CONSENTEMENT

L’Atelier de recherche collective sur le consentement avec l’artiste Mallika Taneja prévu les 24 et 25 mars 2020 a dû être annulé en raison des circonstances dues au Covid19. Nous ne pourrons reporter cet atelier car la performance de Mallika ne peut être présentée dans la saison 2020-2021.

Mallika vit en Inde, où son statut d’artiste est controversé et perdure sans soutien. Le théâtre Garonne ainsi que les partenaires associés à la tournée du spectacle prévu en France (Théâtre La Cité à Marseille et la Scène Nationale Cergy-Pontoise et Ligne Directe), ont choisi de maintenir l’accompagnement de l’artiste en terme de coproduction, équivalent aux rémunérations prévues pour les représentations qu’elle n’a pu jouer.
Nous ferons notre possible pour accueillir cette artiste dans une future saison, et vous faire découvrir ses recherches et explorations dans des formes performatives engagées.

Mallika Taneja

Au travers de ses performances théâtrales, Mallika Taneja s’interroge sur la notion d’égalité et sur la façon dont le corps peut tenir tête à l’injustice des structures de pouvoir. Mallika présente dans de nombreux festival internationaux son solo BE CAREFUL qui traite de la culpabilité des victimes, de la prétendue responsabilité des femmes, et de l’ironie par laquelle on pourrait relier la façon dont une femme est vêtue à la violence qu’elle subit. Elle travaille sur un nouveau projet ALLEGEDLY qui étudie les croisements entre consentement, loi, vérité, crédibilité et mémoire. En Inde, elle organise aussi des Midnight Walks lors desquels un groupe de femmes déambule dans les rues de la ville après minuit, un horaire auquel bien peu de gens osent s’aventurer dehors.
Elle vient au théâtre Garonne présenter BE CAREFULL les 3 et 4 avril 2020.

ARCHIVES
Les ateliers et rencontres en 2019

Pour cette deuxième édition, les rencontres-discussions initiées en 2018 se sont enrichies d’ateliers pratiques de recherche et création gratuits avec des artistes femmes de la saison Garonne. Principalement en partenariat avec l’association Apiaf, le projet s’est ouvert aux jeunes lycéennes du lycée Berthelot ainsi qu’à d’autres associations oeuvrant pour l’accessibilité et le droit des femmes : Culture du Coeur, et Femmes Actions Grand Sud entre autres.

Kaori Ito pour une rencontre…

              Le 18 AVRIL 2019 après-midi, les participantes ont pu discuter à bâtons rompus avec la danseuse chorégraphe Kaori Ito : la place de la femme, son évolution, les conditions de chacune selon les pays d’origine et cultures.

Cathy Polo en pratique…

               Les 18 et 19 MAI 2019 au théâtre Garonne, 12 femmes se sont rencontrées pour un atelier de danse mené par Cathy Polo de la compagnie de Maguy Marin. A travers un travail autour du rythme et du corps cet atelier a permis aux femmes de différents âges et horizons, de se rencontrer dans l’expérience de la création.

« Cathy a su nous mettre à l’aise très rapidement et nous mettre en confiance. Sa bienveillance et son écoute nous ont permis de nous exprimer librement sans aucune crainte de jugement. Après une série d’exercices corporels nous avons pu nous essayer à l’improvisation théâtrale. A l’image du travail de Maguy Marin, Cathy nous a fait travailler sur le rythme.
A la fin de ces deux jours nous formions un chœur. Une vraie cohésion s’était installée malgré nos profils très différents. Nous avions toutes le sentiment d’avoir participé à quelque chose de spécial. » Mathilde

Camille Decourtye et expérimentation…

Les 27 et 28 NOVEMBRE 2019, 14 femmes ont participé à l’atelier de recherche Corps*Voix avec Camille Decourtye de la compagnie Baro d’Evel, auteure et interprète du spectacle Là, présenté à Garonne en 2019, et de FALAISE présenté en avril 2020.Le travail, propre aux recherches de la compagnie, portait sur le corps théâtral agissant sans texte, et sur la voix par des formes diverses du chant. Aucun pré-requis (danse ou chant) n’était exigé pour suivre l’atelier.

© Ellen Ginisty / Atelier avec Camille Decourtye

« J’ai vécu ces moments comme une réconciliation. Pas que je sois fâchée avec moi-même mais j’ai pu me rendre compte, en fait je me suis rappelée, que j’avais cette possibilité en moi et que je pouvais me laisser aller. Le temps est passé très vite, trop vite. » Myriam

« L’atelier corps et voix fut pour moi une expérience extraordinaire. Des moments hors du temps, des contraintes, des problèmes ; une bulle de bonheur pendant deux jours qui m’ont fait énormément de bien tant physiquement que moralement. Tout d’abord l’énergie du groupe, mais aussi Camille qui a su nous faire lâcher des barrières, des blocages ». Soazig

© Mathilde Blatgé / Atelier avec Cathy Polo

ENTRETIEN

« Femmes en scène », un projet qui décloisonne

Article rédigé par Florine CLEMENT, Sarah PETIT, Hannah TEMAN et Emma VIVES, dans le cadre de leur projet citoyen en partenariat avec le Théâtre Garonne et le Collège Supérieur de Droit de l’université Toulouse 1 Capitole

Les 27 et 28 novembre 2019, Marie-Claude a participé à l’atelier « Corps & Voix » animé par Camille Decourtye de la compagnie Baro d’Evel, aux côtés de 13 autres femmes. Ce n’est pas le premier atelier auquel elle assiste et pourtant celui-ci l’a particulièrement traversé. Pourquoi ? Nous avons eu l’occasion de la rencontrer et de recueillir son témoignage. Retour sur son expérience…

Tout d’abord, qu’est-ce qui vous a amené à participer à ces ateliers ?

Je suis particulièrement sensible aux violences et injustices que subissent les femmes de par mon parcours. J’ai grandi dans un environnement familial violent et cloisonné et plus tard j’ai subi moi- même des violences conjuguales, physiques et morales. Mais dans ce parcours difficile, j’ai rencontré des femmes de cœur et grâce à elles je n’ai jamais perdu ma joie. Je ne serais sûrement pas celle que je suis aujourd’hui sans avoir traversé ces épreuves. Si je suis capable de dire ça aujourd’hui, c’est grâce à un long chemin instrospectif de 12 années. Mais toutes les femmes n’ont pas ce recul. Ce genre d’atelier est donc l’occasion de rencontrer d’autres individualités ayant un parcours similaire et de travailler ensemble sur nos blocages et nos peurs. Dans chaque histoire de violences conjugales, l’histoire est différente, mais la conclusion reste la même : la femme finit par ne plus exister. Pour se reconstruire, il faut trouver des espaces où l’on peut aborder cela d’une autre manière. Le Théâtre Garonne en est un.

Comment décririez-vous les exercices proposés par Camille Decourtye lors de cet atelier ?

Camille est une artiste particulièrement compétente mais elle a aussi beaucoup plus que la compétence, elle est vivante émotionnellement. Elle a su nous mettre à l’aise et créer un cercle de confiance très rapidement. Grâce aux exercices proposés, nous avons pu laisser nos corps s’exprimer librement à travers nos gestes, nos déplacements ou même des mouvements de danse. Nous nous sommes également exprimées par la voix et le chant. Mais avant tout, ce sont nos émotions que nous devions faire sortir : imiter des pleurs, la joie, la peur…. Cela n’est pas toujours facile, surtout devant des personnes que l’on connait à peine. Mais nous étions dans un espace rassurant, il n’y avait aucun jugement.

En quoi ces ateliers peuvent-ils aider les femmes qui y participent ?

Ces ateliers sont une véritable bouteille d’oxygène, un stock d’énergie. Il existe des endroits où l’on peut s’autoriser à être réellement. On touche quelque chose qu’on ne peut pas toucher dans notre quotidien. En effet, nous sommes conditionnés, formatés et nous répondons aux attentes de la société. Or ce genre d’ateliers permet de se réinventer et de lâcher-prise.

Mais parce qu’il est difficile de lâcher prise, ces ateliers peuvent aussi être assez violents pour certaines personnes. On retient nos émotions, on ne s’autorise pas à vivre et ressentir ce que notre corps veut extérioriser. Il faut alors se déranger et ne pas avoir peur de rencontrer cette partie de nous que nous refoulons. Au cours de l’atelier, des femmes ont pleuré, ont réussi à se lâcher. C’était très émouvant.

Selon vous, participer à ce genre d’atelier est-il un acte féministe ?

Je n’aime pas vraiment le terme de féminisme. Malgré que je défende les causes des femmes, je ne me suis jamais vraiment sentie féministe . Selon moi, le féminisme me paraît parfois trop agressif envers les hommes. Je ne me sens pas dans ce registre là. Il faudrait tenter de trouver d’autres moyens pour faire avancer les choses, non pas contre les hommes mais avec les hommes. Ensemble. Je dirais donc que participer à cet atelier est un acte pour les femmes et même, si je vais plus loin, pour toutes les femmes. Car quelle femme n’a pas subi, au moins une fois dans sa vie, de la violence ? Que ce soit dans le milieu familial, professionnel, relations amoureuses, sorties diverses, etc. Qui ?

Pour finir, que retenez-vous de cette expérience ?

Ces ateliers déstructurent, décloisonnent et déconstruisent. C’est compliqué de mettre des mots dessus mais il s’en dégage quelque chose d’authentique, d’archaïque, de brut. Le but n’est pas d’avoir l’air intelligent mais de répondre quelque chose de juste à quelqu’un. Simplement chercher quelque chose de vrai avec nous même. Je pense que c’est ce qu’on a de plus précieux et c’est ce que je suis venue chercher et trouver dans cet atelier : la justesse avec moi-même et avec les autres.

La rencontre avec Marie-Claude se termina avec la lecture d’un texte-témoignage qu’elle a rédigé suite à l’atelier dont voici un extrait : « Peut être oui c’est ça… Quand on sort de là… C’est comme une remontée en surface avec l’énergie d’une émeraude, une forme de ravissement avec l’oubli de la souffrance… Quand on sort de là… C’est comme un secret de joie -entre nous- pour continuer la grande vie et faire venir de l’air. »

L’édition Femmes en scène, partage d’expériences 2019 a été soutenue par la DRAC Occitanie, ainsi que par la ville de Toulouse et l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires – Préfecture de la Haute Garonne dans le cadre de la charte de La Politique de la Ville dont le théâtre Garonne est signataire.