5 - 12 février

Beckett Boulevard

de KOE (Belgique)

création de la version française

Beckett Boulevard

De KOE [Belgique]

Une descente faustienne vers les lieux où réside le pouvoir. Quelque part au centre, semble-t-il

Nous nous imaginons que ça commence prosaïquement.
Par une actrice (Natali Broods) qui décide de mettre fin à sa carrière et d'entrer en politique.
Pourquoi pas ?
Et pourquoi la première scène ne se déroulerait-elle pas au restaurant ? Et pourquoi la future politicienne ne dînerait-elle pas avec son ex-mari (Willem de Wolf) ? Et pourquoi, après un moment, ne seraient-ils pas rejoints par un serveur (Peter Van den Eede) ? Et pourquoi la future politicienne n'accepterait-elle pas l'invitation du serveur à l'accompagner au casino du rez-de-chaussée ?
Pour que la pièce, la future politicienne, le serveur et l'ex-mari puissent s'égarer immédiatement, descendre immédiatement, afin de se laisser éblouir par la force centripète du bonheur.
Le centre est obstinément recherché par tous, mais disparaît tout aussi rapidement, en même temps que tout le monde.
Beckett Boulevard est une pièce dont nous savons uniquement qu'elle commence et finit quelque part.
Une « pièce mal faite ».

de KOE

De KOE est un laboratoire théâtral qui mène la recherche, l’expérimentation et la nouveauté sur un mode hédoniste. Les acteurs développent divers procédés grâce auxquels des liens toujours nouveaux se tissent entre les textes, l'autobiographie, les souvenirs et les visions: "Nous en tirons du matériel authentique, pour des représentations vivantes, métaphoriques et personnelles au message apparemment apolitique." de KOE.
La compagnie a présenté à Garonne : Qui a peur de Virginia Woolf ? (2008), Outrage au public (2011), L'homme au crâne rasé (2014), BlancRougeNoir (2015), et avec tg STAN : My Dinner with André (2005, 2007, 2014), Onomatopée (2014), Atelier (2017).

dates de la tournée française :

5-8 et 11-12 fév  -  Théâtre Garonne, Toulouse
5-6 mars             -  Théâtre du Bois de l'Aune, Aix-en-Provence
10-12 mars         -  Théâtre la Vignette, Montpellier

Théâtre
5 > 12 Février
mer 5 fév / 20:00jeu 6 fév / 20:00ven 7 fév / 20:30sam 8 fév / 20:30mar 11 fév / 20:00mer 12 fév / 20:00
théâtre Garonne

durée 1h40
Coproduction / création de la Version Française
Tarifs de 10 à 25€
Beckett BoulevardBeckett Boulevard

Beckett Boulevard de la Compagnie De Koe – Willem de Wolf, Peter Van den Eede et Natali Broods –raconte – plus ou moins – une histoire, mais ce n'est qu'un prétexte pour montrer comment la quête de « l'identité » nous joue des tours. Si quasiment en passant, leur pièce puise dans de vastes connaissances intellectuelles, c'est avant tout le jeu d'acteur qui est formidable. Et si par moment tout semble déraper, sachez que les apparences sont trompeuses, surtout ici.
Ils qualifient le spectacle de « pièce mal faite », mais en réalité Beckett Boulevard est une intrigue astucieuse autour d'un couple de comédiens récemment divorcé. La femme, Broods, annonce à son ex qu'elle compte entrer en politique. Là-dessus l'homme, De Wolf, lui inflige une petite leçon sarcastique d'analyse politique. Ce n'est qu'ensuite qu'ils remarquent un serveur qui semble vaguement familier. Alors que l'homme s'est rendu aux toilettes, la femme a une conversation avec le serveur et comprend qu'il s'agit de leur ancien compagnon Peter. Ou fait-elle semblant – tout comme son ex – de le reconnaître seulement maintenant ? Pourquoi ? À la fin, les masques tombent et les comédiens exposent leur vrai visage.
Ce serait l'intrigue rêvée d'une "comédie des erreurs" ou d'un drame psychologique, mais ici, il n'y a rien de tel. En effet, les trois acteurs gâchent l'histoire en se campant tout le temps devant, tantôt pour donner libre cours à leur ressentiment, tantôt pour se complaire dans des plaisanteries "intertextuelles" recouvertes d'une fine couche de mauvais goût. Visiblement, la compagnie reste profondément attachée à cette attitude typique des années 1980.
Et on pourrait facilement s'en irriter. Mais ce serait dommage, car toutes ces absurdités servent à faire passer des questions captivantes et difficiles. Prenez le Beckett Boulevard du titre qui, bien évidemment, fait penser dès le départ que cette pièce s'inspire du grand Samuel Beckett. Mais cette idée est déjà réfutée tôt dans le spectacle, quand les comédiens sortent complètement de leurs rôles. Soudain ils parlent d'eux-mêmes, comme s'ils étaient dans une émission-débat à la télévision. Selon les habitudes du genre, ils disent n'importe quoi tout en sollicitant l'attention des spectateurs. C'est alors qu'ils se souviennent qu'un jour, à Québec, ils se sont perdus dans un parking souterrain sur Beckett Boulevard, jusqu'à se retrouver coincés au niveau -9. Est-ce que le titre a donc été expliqué ?
Eh bien non, car comment le moment où ils oublient qu'ils jouent une pièce pourrait-il justement fournir le titre de cette pièce ? Est-ce que cette histoire est aussi fortuite qu'ils veulent le faire croire ? Non. C'est une version moderne de la descente aux enfers de Dante, jusqu'au neuvième cercle. La question qui reste est celle-ci : de quel enfer s'agit-il ici ? Deux monologues de Peter Van den Eede, respectivement au début et à la fin de la pièce, nous l'apprennent. Dans ces deux monologues, il parle à son reflet pour trouver la sérénité. Il y parvient la première fois, mais la seconde fois son reflet (un film projeté sur le miroir) le traite de falsificateur qui abuse de son passé. C'est une scène brillante et fascinante. Le reflet termine en récitant un poème « de ton père, quand il avait la moitié de ton âge actuel : Entre nous enfle la rivière / et plus éperdue se fait la course / entre ici et là / entre là et ici ».
Ici se discerne parfaitement l'enjeu de la pièce : la quête d'une identité, de "racines", de quelque chose d'inaliénable pouvant être appelé le "moi". Voilà ce que Van den Eede cherche dans un miroir… Et c'est précisément sur ce clou-là que Samuel Beckett a tapé tout au long de son œuvre. Le héros typique de Beckett est un homme qui voit s'effriter toujours davantage son identité. Plus il en parle et moins il réussit à dire quelque chose. C'est une descente aux enfers pire que celle de Dante. Et c'est précisément ce que constate Van den Eede : notre identité est une donnée instable. Toute rencontre avec un autre, mais aussi toute image proposée par les médias, est comme un miroir déformant, jusqu'à ce que nous ne sachions plus qui nous sommes.
Et voilà ce qui rend cette pièce vraiment remarquable : les comédiens exploitent leur propre position de personnalités publiques pour rendre visible l'obsession actuelle de l'identité, encouragée par les médias. De fausses interviews avec Jan Hautekiet [homme de radio] et Tom Lenaerts [présentateur télé] illustrent que la télévision grossit énormément leur personnalité. Cette pièce suggère que de telles choses entravent considérablement l'épanouissement d'une personnalité forte, même si les médias ne cessent d'encourager les gens à « surtout rester eux-mêmes ». Essayez donc !
Ce n'est pas un hasard si dans ce récit, Peter Van den Eede s'est octroyé le rôle du serveur. Le serveur est le prototype même d'un "personnage public", de quelqu'un qui s'adresse à tout le monde et à qui tout le monde peut s'adresser. De par son occupation, le serveur fait preuve de courtoisie et se montre sociable. Mais il joue tout cela, il n'est pas sincère. Pourtant, nous apprécions qu'en jouant son rôle, un serveur se montre plein de verve et de véracité, même si nous comprenons qu'ainsi il ne livre rien de son identité. Nous ne serions pas contents si le serveur nous en encombrait. Son jeu est l'huile qui fait tourner le moteur social. Pourtant, comme le faisait déjà remarquer Richard Sennett dans son étude classique Les Tyrannies de l'intimité [The fall of public man], actuellement le type de "mensonges honnêtes" accompagnant le jeu social nous semble souvent suspect. Nous préférons la sincérité grincheuse à la brillante chorégraphie sociale. Mais pourquoi en est-il ainsi ? La quête pitoyable de qui nous sommes réellement est en effet source de confrontations non souhaitées, de "révélations" inutiles et blessantes et d'autres afflictions. C'est ce que nous voyons dans Beckett Boulevard, sous une forme grossie. C'est aussi la « morale » des dernières paroles de Natali Broods : peut-être vaudrait-il mieux mentir le plus sincèrement, le plus civilement possible ?

Theater Festival
 

Beckett BoulevardPresse

Voilà ce qui assure magistralement la cohérence de la pièce : un mouvement asymptotique interrompu vers le centre, qui insiste sur l'indicible en le maintenant à une distance appropriée.
Etcetera

Dans Beckett Boulevard, des déclarations d'une simplicité trompeuse à propos de trois fois rien acquièrent une profondeur vertigineuse. La pièce aboutit à un exercice de réflexion caustique sur l'image de soi et l'identité, sur la question ultime de savoir qui nous sommes. Le résultat est une comédie d'erreurs caduque, balançant sur le fil entre philosophie et ergotage.
De Standaard

Au moment où la fin redevient le début, on se délecte à nouveau de formules douces-amères (la solitude s'empare uniquement de vous quand vous avez du temps en abondance), de l'insoutenable légèreté de l'être (l'espuma), de l'humour absurde (pourquoi les mauvais acteurs font-ils de bons serveurs), du pouvoir thérapeutique de l'art (l'avant-dernier morceau), tandis que la politique est achevée en une minute.
De Morgen

C'est un Beckett Boulevard merveilleusement absurde que sert De KOE sur un plateau, tout à fait dans la tradition de Samuel Beckett.
Concertnews

Beckett Boulevard est une quête nonchalante, comique et intègre de l'identité et de l'authenticité.
Cutting Edge ****

Beckett BoulevardPortrait

Peter Van den Eede est diplômé du Conservatoire d’Art Dramatique d’Anvers en 1987. Depuis 1989, il est fondateur et directeur artistique de la compagnie de KOE. Il est également metteur en scène, auteur et acteur principalement pour sa compagnie. Il coproduit des spectacles avec entre autres tg STAN, My dinner with André, des textes de Wallace Shawn et André Gregory ; avec tg STAN et Maatschappij Discordia : Du serment de l’écrivain du roi et de Diderot, d’après Le paradoxe du comédien de Denis Diderot et Atelier.
Il est nominé pour le Prix Louis d’Or / meilleur acteur, pour son rôle dans L’homme au crâne rasé. Il participe également à plusieurs projets de la télévision flamande et du cinéma. Il a enseigné à Anvers, Maastricht et à Arnhem en Hollande.

Willem de Wolf est sorti en 1985 de la Toneelschool d'Amsterdam. La même année, il a fondé avec Ton Kas le duo théâtral Kas & de Wolf, qui a créé près de quinze pièces. En 2002 le duo a remporté le VSCD Mimeprijs pour le spectacle Ons soort mensen. Après la fin des subventions en 2004, Willem de Wolf a écrit, entre autres, le texte bazel pour Dood Paard, et Hannah & Martin pour mugmetdegoudentand, en collaboration avec Lineke Rijxman et Joan Nederlof.
Son monologue Krenz de gedoodverfde opvolger a été nommé au prix du meilleur texte dramatique Taalunie Toneelschrijfprijs en 2012. En « polycoproduction » avec  tg STAN, Dood Paard et Maatschappij Discordia, Willem de Wolf a créé les spectacles Onomatopée, We hebben een/het boek (niet) gelezen et Beroemden. De 2004 à 2009, il a fait des études de Langue et Culture allemande à l'université d'Amsterdam.

Natali Broods est diplômée du Studio Herman Teirlinck d’Anvers en 2000. Elle est membre permanent de l’équipe artistique de de KOE depuis 2002. Actrice et auteur, elle y participe à la plupart des productions: Qui a peur de Virginia Woolf ?, textes E. Albee, Outrage au Public de Peter Handke et L’homme au crâne rasé, d’après J. Daisne, présentées en France respectivement en 2008 , 2011 et 2014. Elle a travaillé avec Tg STAN à plusieurs reprises : Les Antigones, textes Jean Cocteau/Jean Anouilh, Poquelin d’après Molière et Le Chemin solitaire de Arthur Schnitzler.
Elle travaille pour la télévision flamande et a tourné dans plusieurs long-métrages. Pour le rôle principal dans Anyway The Wind Blows de Tom Barman, elle a obtenu le Prix Joseph Plateau de la meilleure actrice. Elle apparaît également dans le film à grand succès La Merditude des choses de Felix Van Groeningen. Plus récemment, elle a joué dans Waste Land (2014) de Pieter Van Hees et Galloping Mind de Wim Vandekeybus, pour lequelle elle a reçue le prix Ensor pour meilleur rôle de soutien féminin.