15 > 17 DÉC

GRADIVA, CELLE QUI MARCHE

Stéphanie Fuster

coproduction

Gradiva, celle qui marche

Stéphanie Fuster

"Gradiva m’est apparue et s’est inscrite immédiatement dans ma mythologie personnelle telle un guide dans ma recherche d’un féminin profane éloigné de toute transcendance, une amie, une autre magie." Stéphanie Fuster

Au musée Chiaramonti du Vatican, parmi les statues de divinités et d’empereurs, marche Gradiva. Jeune patricienne saisie sur un bas-relief en son geste quotidien, insouciante du regard posé sur elle. "Ce mouvement évoquait l'agilité en même temps que la légèreté de la démarche […], mais aussi une tranquille confiance en soi. Et c'est cette légèreté d'oiseau, associée à la fermeté de l'attitude, qui lui conférait cette grâce toute particulière." Ainsi la décrit en 1903 le narrateur de Jensen dans la nouvelle qui la nomme pour la postérité, et dans laquelle Norbert, un jeune archéologue, part à Pompéi en quête de cette figure qui le fascine. Analysé par Freud au prisme du rêve, son mystérieux pouvoir d’attraction en fera notamment une égérie surréaliste. C’est chez Dalí que Stéphanie Fuster l’avait croisée sans la connaître, femme trouée aux résonances multiples. Mais la véritable rencontre s’est faite avec l’originale : celle sculptée dans le marbre, si différente des représentations de femmes pâmées ou dansantes ; celle qui marche devant elle et semble tellement libre, le regard tourné vers l’intérieur. "Une amie, surtout pas une effigie, une amulette que j’aimerais avoir avec moi, me nourrir de sa présence, marcher dans son sillon." C’est par le mouvement et les mots que la danseuse de flamenco et metteuse en scène explore le mythe : circulant entre Gradiva et Norbert, elle recherche ce qui résonne si fort en elle, en nous, de cette marche à la fois simple et puissante. Elle, qui depuis longtemps déconstruit sa propre pratique, interroge avec Fanny de Chaillé et Clémence Coconnier la fascination exercée par le personnage iconique qu’elle incarne en tant que danseuse, bouscule l’image, la représentation, et creuse dans le langage du flamenco qu’elle maîtrise à la perfection pour trouver cette même authenticité, profondément vitale. Tout défaire, déshabiller, démystifier, mettre à plat et voir ce qui demeure de l’énergie et de l’ardeur.

Danse
15 > 17 Décembre
mer 15 déc / 20:00jeu 16 déc / 20:00ven 17 déc / 20:30
Création / Coproduction / Avec La Place de la Danse
Gradiva, celle qui marche Note d'intention

En découdre avec le flamenco, telle a été ma quête durant de longues années. En découdre avec la fascination, l’aimantation, l’électrification qu’il produisait en moi, et sur le public. En découdre avec le fantasme, l’hallucination et l’image.

La tâche était ardue tant les liens physiques, biographiques et psychiques qui me liaient à cet art étaient nombreux, noués, tressés, entrelacés et composaient finalement la trame de mon propre être femme. Après le long et profond travail que j’ai mené dans la pièce Questcequetudeviens? dans laquelle Aurélien Bory, metteur en scène, ami, peignait mon portrait et à travers lui, celui de mon lien à la danse, c’est un glissement qui m’amène à dire « je », « je vois », « je suis », « je dis ». Quelle toile tisse le flamenco, comment l’aimer et s’en libérer ? Que nous dit-il du féminin pris dans ses filets, véritable espace de projection des désirs et du regard masculin et féminin ? Le flamenco, c’est Gradiva. C’est cette figure de marbre, immobile et pourtant en marche, qui fascine. Je veux exhumer ce corps des cendres et avec la précision de l’archéologue, en sonder chaque parcelle.

Comprendre la mécanique de son mouvement, dépecer ses mystères.

Gradiva, celle qui marche Entretien

Comment avez-vous découvert Gradiva ?

La première approche s’est faite via un dessin de Salvador Dali figurant sur une carte postale que j’avais achetée au Musée Dali à Figueras. J’ai été très sensible à la puissance qui émanait de la femme représentée dans ce dessin, sans savoir alors de qui il s’agissait. Plus tard, au cours de mes recherches sur le féminin, j’ai rencontré la figure de Gradiva dans un texte, accompagné d’un bas-relief. Le fait qu’elle marche, sa position, son attitude légère, presque dansante, empreinte à la fois de grâce et de fermeté : tout cela m’a beaucoup plu. Bien après, j’ai découvert que la femme du dessin de Dali n’était autre que Gradiva et je me suis dit qu’il se passait quelque chose avec elle (sourire). Ensuite, j’ai approfondi mes recherches, j’ai lu notamment la nouvelle de Wilhelm Jensen (parue en 1903, NDR) et le texte de Freud qui la commente (Le délire et les rêves dans la « Gradiva » de W. Jensen, NDR). J’ai été vraiment saisie par Gradiva.

Qu’est-ce qui vous appelle en elle ?
Pour moi, elle est devenue comme une figure de proue, incarnant une posture féminine différente de celles que j’avais l’habitude de côtoyer dans l’univers du flamenco. Elle porte en elle tous mes questionnements et me confronte en particulier à deux d’entre eux, intimement liés : qu’est-ce qu’être une femme ? et pourquoi suis-je autant fascinée par le flamenco ?

De quelle manière ces questionnements s’incarnent- ils dans Gradiva, celle qui marche ?
Fanny de Chaillé, qui signe la mise en scène, m’a apporté son précieux regard sur la pièce. Le processus créatif se fonde avant tout sur une exploration de mon rapport au flamenco en tant que femme. Contrairement à l’image stéréotypée que l’on peut en avoir, le flamenco est une danse très complexe, qui demande beaucoup de sérieux et de travail. Je m’attache ici à la déconstruire en travaillant sur la langue, les mots autant que les gestes, les mouvements et les rythmes. En parallèle, je creuse la question de savoir comment on peut être femme. La musique – du flamenco traditionnel ou revisité – tient une place importante dans la pièce mais elle n’est pas jouée live. Je suis seule sur un plateau nu. J’essaie de décomposer et de dénuder au maximum à tous les niveaux. Cela n’en constitue pas moins une déclaration d’amour au flamenco, la passion de ma vie.

Propos recueillis par Jérôme Provençal, pour Ramdam, novembre 2021

Gradiva, celle qui marche Presse

"Gradiva, celle qui marche. Un spectacle où la danseuse professionnelle et chorégraphe s’attache à définir le geste flamenco, expressif, pulsionnel, rythmique, tout en s’interrogeant sur sa résonance sur les plans identitaires et imaginaires. Par le biais de la figure antique de Gradiva, Stéphanie Fuster se livre, seule sur scène, à une performance exceptionnelle et aborde la fascination, le principe du féminin et la mise en mouvement d’une femme en action. Une exploration du flamenco et du féminin qui passe par une recherche esthétique, audacieuse et inattendue, entre souliers amplifiés qui battent le plancher, jeu de lumières et d’échos sonores qui accompagnent la décomposition du geste, et participent à comprendre, voire redéfinir un genre. Stéphanie Fuster, qui maîtrise à la perfection le flamenco, évoluera par ailleurs sur un superbe plancher de chêne à travers une mise en scène brillante et sensible signée Fanny de Chaillé.
Avis à tous les amateurs de flamenco, de danse ibérique et plus généralement aux passionnés de danse !"

La Dépêche du midi, 5 novembre 2021

Portrait

Stéphanie Fuster est danseuse de flamenco, chorégraphe, interprète et pédagogue. Son travail s’attache à définir le geste flamenco, expressif, pulsionnel, rythmique, et à interroger ses résonances sur les plans identitaires et imaginaires.

D’abord élève d’Isabel Soler à Toulouse, elle part ensuite se former à Séville, berceau du flamenco, grâce à la bourse d’études supérieures chorégraphiques du Ministère de la Culture. Elle y approfondit sa pratique pendant huit ans, auprès des maîtres de cet art, dans les tablaos et les compagnies sévillanes. Elle a dansé notamment pour Israel Galván (Bienal de Sevilla, Orange County Festival) et Juan Carlos Lérida, deux chorégraphes qui ont marqué durablement son parcours. De retour en France, elle fonde à Toulouse La Fábrica Flamenca, espace dédié à la formation et à la création flamenca, où elle a formé de nombreuses danseuses devenues professionnelles. Elle chorégraphie El Divan du Tamarit de F.G Lorca en 2006. Aurélien Bory écrit pour elle en 2008 Questcequetudeviens?, portrait dansé, nommé aux Olivier Awards, toujours représenté en France et à l’étranger (Barbican Londres, Teatro Central Sevilla, National Taichung theater, City Hall Hong Kong, Théâtre des Amandiers Nanterre, Théâtre Monfort Paris, Mercat de les Flors Barcelone, Théâtre Vidy Lausanne,…). Leur étroite collaboration se poursuit avec Corps Noir, performance qu’elle réalise pour la première fois en 2016 au Musée Picasso à Paris et dans les opéras Le Château de Barbe Bleue de Belá Bartók et Parsifal de Richard Wagner au Théâtre du Capitole à Toulouse.
En parallèle, ses rencontres artistiques avec les musiciens José Sanchez, Alberto Garcia, Niño de Elche (Odisea, 2013 ; Andanzas, 2015), Elise Effremov et Gilles Colliard (Partita Flamenca, 2019) l’amènent à parcourir les rapports étroits de la danse et de la musique au sein du flamenco ou dans ses marges, entre silence et saturation.
Elle participe régulièrement à des improvisations notamment pour le CHU de Toulouse, afin de tisser un langage là où les mots ont déserté les corps pour dire les mouvements de l’âme.
Sa réflexion sur le flamenco se nourrit aujourd’hui d’apports pluridisciplinaires (psychanalyse, droit, philosophie) qui lui permettent de poursuivre son entreprise de déconstruction/réappropriation de cet art, sous des angles nouveaux, comme celui de la norme, du rituel et du rapport au sacré.

Gradiva, celle qui marche Générique

conception, chorégraphie et interprétation Stéphanie Fuster
mise en scène Fanny de Chaillé
collaboration artistique Clémence Coconnier
conseil danse Juan Carlos Lerida
création sonore José Sanchez
direction technique et création lumières Arno Veyrat
régie son Stéphane Ley
construction décor Cyril Turpin
production / diffusion Marie Attard / Playtime
production Compagnie Rediviva / Stéphanie Fuster
coproduction La Place de la danse - CDCN Toulouse Occitanie, Théâtre Saint Quentin en Yvelines, Scène nationale, Théâtre Garonne - Scène européenne - Toulouse, L’Astrada - Marciac, Théâtre Molière, Scène nationale Archipel de Thau, Le Parvis, scène nationale Tarbes Pyrénées / GIE FONDOC, Compagnie 111 - Aurélien Bory / La Nouvelle Digue, La Fábrica Flamenca,

accueil en résidence La Place de la danse - CDCN Toulouse Occitanie, Théâtre Garonne - Scène européenne, Compagnie 111 - Aurélien Bory / La Nouvelle Digue, Théâtre Molière, Scène nationale Archipel de Thau, Ring - scène périphérique, Toulouse, L’Astrada - Marciac
soutiens DRAC - Occitanie, Région Occitanie / Pyrénées-Méditérranée, Conseil Départemental de la Haute-Garonne
remerciements Aurélien Bory, Euriell Gobbé Mevellec, Mladen Materic, Florence Meurisse

création le 6 novembre 2021