30 nov > 3 déc

We Wear Our Wheels with Pride*

*and Slap Your Streets with Color... We Said ‘Bonjour’ to Satan in 1820...

coproduction

We Wear Our Wheels with Pride... *

Robyn Orlin
Moving Into Dance Mophatong [Afrique du Sud]

Nous portions nos roues avec orgueil et éclaboussions vos rues de couleurs... Nous avons dit Bonjour à Satan en 1820.

C’est à nouveau dans la culture de rue sud-africaine que l’incendiaire Robyn Orlin puise son matériau : sur le front de mer de Durban, où les pousse-pousse tirés par des Zoulous véhiculaient les colons de son enfance. Moins nombreux aujourd’hui, ces rickshaws demeurent des attractions pour touristes. Leurs conducteurs rivalisent d’exubérantes coiffes multicolores à franges, plumes et cornes : oeuvres d’art composites dont l’esthétique interpelle tout autant que leur façon de mener leurs courses, puisqu’ils « semblent danser, le corps suspendu dans les airs », observe la chorégraphe. À son habitude, elle interroge un vocabulaire physique authentique, le déconstruit et le confronte à sa propre théâtralité jusqu’à ce qu’il laisse apparaître ses soubassements socio-politiques. Une danse hors style, faite de collages et d’hybridations entre rituels africains et motifs européens, qui restitue une part de la complexité de ce pays, dans lequel 5 000 colons britanniques débarquaient en 1820 y imposant leur domination pour quelque 180 ans. Avec les danseurs de Moving into Dance, une compagnie pluri-ethnique de Johannesburg accueillant des étudiants défavorisés, Robyn Orlin explore cette impétueuse et solaire danse du travail, et ce qu’elle exprime de la fierté des individus face à leurs oppresseurs. Une dignité investie par l’humour, le travestissement, la transgression esthétique : autant de façons d’être libre.

Danse
30 Novembre > 3 Décembre
mer 30 nov / 20:00jeu 1 déc / 20:00ven 2 déc / 20:30sam 3 déc / 20:30

durée 1 h 10
Coproduction
tarifs généraux de 12 à 20 € / tarifs adhérents de 10 à 15 €
à propos...

Robyn Orlin a souvent parlé de ces démonstrations de danse traditionnelle, organisées par les propriétaires miniers des environs de Johannesburg, auxquelles, toute enfant, elle assistait le week-end avec sa mère : ces compétitions où les mineurs (noirs, forcément) se produisaient devant un public majoritairement blanc « m’ont beaucoup appris sur la danse, explique-t-elle, et c’est aussi là que j’ai forgé mes premières opinions politiques ». C’est en manière d’hommage à ces danseurs, et à l’expérience fondatrice qu’elle leur doit qu’en 2004, elle a réalisé son film Hidden Beauties, Dirty Stories (Beautés cachées, sales histoires). Mais c’est sur un autre souvenir d’enfance du temps de l’Apartheid, un souvenir qui l’a également profondément marquée, que se fonde cette prochaine création scénique pour laquelle Robyn Orlin travaillera avec huit jeunes danseurs sud-africains. Il s’agit des rickshaws zoulous, ces pousse-pousse alors nombreux dans les rues de Durban et dans la région du KwaZulu-Natal, dont les « pousseurs » (ou plutôt les tireurs), avec leur démarche bondissante, lui « semblaient danser, le corps suspendu dans les airs ». Malgré la stricte réglementation qui régissait cette pratique coloniale, les conducteurs de rickshaw rivalisaient d’inventivité en personnalisant leur véhicule (s’ils le pouvaient, puisque celui-ci ne leur appartenait pas) et surtout leur costume : des tuniques terminées par des franges et brodées de perles multicolores, reprenant les motifs traditionnels de la culture zouloue, et surtout des coiffes, parfois monumentales, faites de plumes, de perles, de graines, également multicolores, et de deux, quatre, voire six cornes de vache. Selon les interprétations, ces cornes (les identifiant au taureau) étaient un signe de dignité et de puissance pour ceux qui les portaient, tout en dénonçant le statut de bêtes de somme auquel les réduisait leur activité. La beauté manifeste de ces parures a donc son revers, elle dissimule une « sale histoire » que Robyn Orlin veut mettre en lumière : car, évoquer les rickshaws zoulous, rappeler leur existence et leurs conditions de vie, sera évidemment pour elle l’occasion de revenir à la question de la colonisation, qui est récurrente dans son oeuvre. Mais elle souhaite du même coup se faire l’écho de ce qui, chez ces hommes, relève du détournement, de la sublimation, de l’ironie et de l’auto-ironie, c’est-à-dire aussi d’un certain refus de transiger avec leur dignité. Robyn Orlin a, par ailleurs, pris le parti de s’appuyer pour cette création sur une oeuvre de l’artiste allemande Rebecca Horn, Concert for Anarchy (1990). Une installation, une sculpture mécanique qui consiste en un piano à queue suspendu en hauteur par les pieds, un piano surplombant, mais sens dessus dessous, dont le couvercle s’ouvre à intervalles réguliers, révélant les « entrailles » – les cordes, la table d’harmonie –, tandis que les touches jaillissent en désordre du clavier, en produisant des sons discordants… avant de reprendre silencieusement leur place. Quant au lien entre cette oeuvre et les rickshaws zoulous, il résulte pour Robyn Orlin d’un réseau d’associations « libres » comme on dit, et plus ou moins conscientes (où la forme de la coiffe des conducteurs de rickshaw évoquerait celle d’un piano à queue, où le piano représenterait une métaphore possible de la culture occidentale, laquelle s’impose comme dominante dans le système colonial)…, auquel s’ajoutent certaines qualités propres au travail de Rebecca Horn (usage du corps, détournement, sublimation)… et, pourquoi pas, le nom même de cette artiste.

Myriam Bloedé

Presse

"C'est décoiffant et audacieux, hors norme,atypique, fantaisiste, transgressif, à l'image de la chorégraphe pétrie d'humour et d'ironie: un mécanisme de survie face à l'absurdité des situations. C'est malgré tout, submergée de tristesse qu'elle crée cette pièce, chevauchée critique des us et coutumes des colons blancs contre les populations esclaves. Les rickshaws comme emblèmes de ce pouvoir…Pas de retraite pour Robyn Orlin, créatrice hors norme de rick-shows room ébouriffants en colors' friday!"

Geneviève Charras, L'Amude-danse, novembre 2021

 

"L’artiste n’a jamais dissocié ses choix esthétiques de son engagement public, ce qui lui valut d’être marginalisée par le milieu conservateur de la danse contemporaine au temps de l’apartheid. Son travail chorégraphique mobilise plusieurs champs artistiques, mêlant à la danse la vidéo et les arts plastiques qui prennent ici une place prépondérante, afin d’explorer différentes théâtralités. Assumant son éclectisme et un certain goût pour la flamboyance, elle pose un regard acéré sur le monde qui l’entoure. Ses oeuvres sont à la recherche d’une forme d’immédiateté qui implique le public. « La beauté au théâtre ne m’intéresse pas. Ni la technique des acteurs ou des danseurs. C'est leur humanité que je cherche» dit-elle." 

Guillaume Lasserre, le Club de Médiapart, juin 2021

 

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Biographie

Robyn Orlin est née en 1955 à Johannesburg. Surnommée en Afrique du Sud “ l’irritation permanente ”, elle relève, à travers son oeuvre, la réalité difficile et complexe de son pays. Elle y intègre diverses expressions artistiques (texte, vidéo, arts plastiques…), afin d’explorer une certaine théâtralité qui se reflète dans son vocabulaire chorégraphique. On lui doit notamment Daddy, I’ve seen this piece six times before and I still don’t know why they’re hurting each other (1999) qui a obtenu le Laurence Olivier Award de la réalisation la plus marquante de l’année. Sa pièce sur Sara Baartman la Venus noire (2011), « …have you hugged, kissed and respected your brown Venus today ? » a fait l’objet d’une grande tournée internationale. Beauty remained for just a moment then returned gently to her starting position ... (2012) fut le spectacle d’ouverture de la saison Sud-Africaine en France en mai 2013. Elle a mis en scène L’Allegro, il penseroso ed il moderato de Haendel à l’Opéra national de Paris, dont la première a eu lieu le 23 avril 2007. Robyn a créé une mise en scène de Porgy & Bess à l’Opéra Comique à Paris en juin 2008. C’est en coproduction avec l’INA et ARTE qu’elle a réalisé en octobre 2004 son premier film Histoires cachées, sales histoires. Robyn Orlin a été nommée Chevalier de l’Ordre National du Mérite en 2009 et Chevalier Arts et Lettres en 2015. "At the same time we were pointing a finger at you, we realized we were pointing three at ourselves…" une pièce avec les danseurs de l’Ecole des Sables de Germaine Acogny fut créée en 2014 au festival d’Avignon et « And so you see … » au Festival de Montpellier en juin 2016 avec Albert Khoza. En 2017, elle crée au CNDC d’Angers « Oh Louis… we move from the ballroom to hell, while we have to tell ourselves stories at night so that we can sleep… » pour Benjamin Pech, ancien danseur étoile à l’Opéra de Paris présenté en Louis XIV et Loris Barrucand, claveciniste. La pièce tournera ensuite au Festival de danse de Cannes en 2017, au Théâtre de la Cité Internationale puis au Théâtre de la Ville à Paris, au Kinneksbond Centre Culturel Mamer au Luxembourg et au Théâtre de Caen. En avril 2018, Robyn Orlin reprend la mise en scène de la pièce « Pygmalion » de Rameau, en Résidence à l’opéra de Dijon, en collaboration avec Emmanuelle Haïm à la direction musicale.

We Wear Our Wheels with Pride... *Générique

chorégraphie Robyn Orlin
avec les danseurs de Moving into Dance Mophatong : Sunnyboy Motau, Oscar Buthelezi, Eugene Mashiane, Lesego Dihemo, Sbusiso Gumede et Teboho Letele
création vidéo Eric Perroys
création costumes Birgit Neppl
création lumières Romain de Lagarde
musique originale UkhoiKhoi avec Yogin Sullaphen et Anelisa Stuurman
régisseur général Jean-Marc L’Hostis
régisseur de tournée Thabo Pule
régisseur plateau Jordan Azincot
administration, diffusion Damien Valette
coordination Louise Bailly

production City Theater & Dance Group, MIDM – Moving into Dance Mophatong et Damien Valette Prod
coproduction Festival Montpellier Danse, Tanz im August – 32, Internationales Festival Berlin, Chaillot – Théâtre national de la danse, Le Grand T – Théâtre de Loire-Atlantique, Charleroi Danse – Centre chorégraphique de Wallonie, théâtre Garonne – scène européenne, Toulouse – Château-Rouge, scène conventionnée d’Annemasse
avec l’aide au projet de la DRAC Ile-de-France

création 2021 à Chaillot – Théâtre national de la danse en juin 2021