28 SEPT > 19 OCT

Australia Express, regards croisés sur la scène australienne

Australia Express

L’Australie : c’est peu dire que la plupart d’entre nous ne connaissons pas grand-chose de cette île de la taille d’un continent, perdue à l’autre bout de la planète – hormis quelques clichés qui ne cessent de nous revenir à la face, à la façon du fameux boomerang. C’est précisément dans ce relatif isolement que, là-bas, se développent des univers artistiques singuliers, à la croisée des mondes – influences de l’Asie voisine, regard tendu vers les Etats-Unis et mémoires européennes s’y mêlent en des combinaisons toujours surprenantes, avec des nuances typiquement locales. Et c’est bien entendu cette extrême étrangeté qui rend la scène australienne si unique…

En cet automne 2019, et à l’initiative du théâtre Garonne, l’Australie fait escale à Toulouse avec un programme foisonnant de spectacles, films, rencontres diverses concocté en partenariat avec le ThéâtredelaCité, la Cinémathèque de Toulouse ou l’Université Jean-Jaurès. Un programme riche, intriguant, forcément plein de surprises, et littéralement sens dessus-dessous : spectacles, films et un cycle de rencontres (dans le cadre du colloque Federal Theater Project).

Australia Express est organisé par le théâtre Garonne et présenté à Aix-en-Provence (théâtre du Bois de l’Aune), Bordeaux (Festival des Arts de Bordeaux – Théâtre du Pont tournant), Aubervilliers (théâtre de La Commune – Festival d’Automne à Paris), Toulouse (théâtre Garonne – scène européenne & Festival La Biennale / Arts vivants / International, le ThéâtredelaCité). Production déléguée de la tournée en France théâtre Garonne – scène européenne. Conseil artistique / production pour l’Australie Alison Halit. Avec le soutien du Gouvernement australien via le Australia Council, du Gouvernement de Victoria via Creative Victoria, et de l’ONDA – Office National de Diffusion Artistique.

 

Tournée française

Bunny - Luke George & Daniel Kok (3 représentations)
1 représentation le 28 septembre 2019 à Toulouse - ThéâtredelaCité dans le cadre de la Biennale Arts Vivants International

Terror Australis - Leah Shelton (10 représentations)
3 représentations les 5 et 6 octobre 2019 à Bordeaux - Théâtre du Pont Tournant dans le cadre du Festival International des Arts de Bordeaux
4 représentations du 10 au 13 octobre 2019 à Aubervilliers - La Commune, centre dramatique national Aubervilliers
1 représentation le 15 octobre 2019 à Aix-en-Provence - théâtre du Bois de l’Aune
2 représentations les 18 et 19 octobre 2019 à Toulouse - théâtre Garonne

Intimacy - The Ranters (8 représentations)
4 représentations du 10 au 13 octobre 2019 à Aubervilliers - La Commune, centre dramatique national Aubervilliers
1 représentation le 15 octobre 2019 à Aix-en-Provence - théâtre du Bois de l’Aune
3 représentations du 17 au 19 octobre 2019 à Toulouse - théâtre Garonne

Bunny

Daniel Kok
Luke George [Singapour]

"Transgressif et vif, Bunny pose de nombreuses questions sur le consentement, la vie privée, la confiance, le pouvoir, la responsabilité collective et le libre arbitre."

Ben Brooker, Real Time Arts 

Dans la culture du bondage, bunny est le surnom donné à la personne qui choisit d’être ligotée par des tiers, dans un entrelacs de cordes savamment nouées. BUNNY (le spectacle) pose la question suivante : et si au théâtre l’ensemble du public était un bunny ? Entre shibari (un art japonais qui est à la servitude volontaire des corps ce que l’ikebana est à l’arrangement floral), installation plastique mouvante séance de méditation, ou même d’art-thérapie collective, BUNNY invite chacun à prendre part – selon son choix, à l’un ou l’autre bout de la corde – à une expérience de bondage participatif en même temps qu’à une chorégraphie d’une extrême délicatesse. Au « fil » de cette performance qui met tous nos sens en éveil, et à l’envers de ce qu’on l’on pourrait craindre, la somme des spectateurs se transforme bientôt en une communauté attentive et bienveillante, des connexions éphémères se tissent, des complicités se nouent: l’essence même du théâtre se révèle ainsi dans un moment où l’être-ensemble l’emporte largement sur la société du spectacle. Par les temps qui courent, c’est un cadeau qui n’a pas de prix.

Danse
28 Septembre
sam 28 sep / 21:30
présenté avec le ThéâtredelaCité, lors de la Biennale, au ThéâtredelaCité

durée 2h
Tarifs de 10 à 30€ / avec carte Biennale de 11 & 17€
BunnyEntretien

Les nœuds sont le moyen le plus simple de créer des connexions, des points d’attache ou des structures entre, avec et dans des matériaux souples. Dans de nombreuses cultures, ils sont profondément enracinés dans l'artisanat traditionnel et peuvent avoir une signification symbolique. Le design contemporain a également trouvé un usage pour les cordes nouées et leur permet désormais de répondre à un éventail de besoins à la fois esthétiques et pratiques.

Les deux danseurs Luke George et Daniel Kok se sont rencontrés pour la première fois en 2014 dans un atelier du Campbelltown Arts Centre à Sydney et ont décidé de créer un spectacle avec des techniques de nœud et de bondage. La première de Bunny a eu lieu à Sydney début 2016. Depuis, la performance a été interprétée à Singapour, en Norvège et au Japon, entre autres. Nous avons parlé des idées et du processus de création de la pièce.

Comment est née l’idée de mettre les techniques de cordes et de nœuds au centre d’une performance ?

Luke George : Lors de nos rencontres et de nos premières discussions, nous avons constaté que nous partagions clairement les mêmes intérêts en ce qui concerne la dynamique du pouvoir entre l’artiste et le public et vice-versa. Nous avons eu l'idée de travailler avec des cordes car en tant que matériau, ça permet de rendre visible la relation entre les personnes et les corps - entre nous en tant que collaborateurs, ainsi qu'entre les interprètes et les spectateurs. Nous avons également été attirés par les nombreux langages métaphoriques possibles à partir de cordes et d’attaches lorsque nous parlons de relations: liens, enchevêtrement, tension, décompression, torsion, suspension, etc. Le choix de tester et de travailler avec de la corde comme matériau a été pris de manière intuitive par le biais de nos discussions sur le spectateur, sur la collectivité et sur la participation à la performance. Nous avons partagé nos expériences personnelles en amour, sexe et rencontres, ainsi que la danse dans les clubs au fil des ans. Quelque part dans tout cela, une corde est apparue. Nous avons tous les deux eu une étincelle dans les yeux et nous nous sommes chacun dit: « Je voudrais essayer ça ». Nous avons donc immédiatement trouvé un dojo de corde (note de l’éditeur: studio pour les cours de bondage), à Sydney, à l’époque, et avons commencé à apprendre. La formation de Daniel en Pole dance et ma pratique du massage sont encore d’autres domaines d’intérêt. Tous ces intérêts convergent vers la question du danseur et du désir de la foule ou du public.

Quelles qualités esthétiques et interactives offrent ces composants ?

Luke George : Nous avons examiné différentes manières de manier les cordes : le macramé, le camping, la voile et l'escalade, les paracords de survie, le servage et les nœuds chinois. Nous avons pris le temps d’étudier ces différentes compétences et métiers; le bondage en particulier bien sûr. Le bondage était le plus influent en raison du rôle joué dans la dynamique du pouvoir entre les personnes. C'est aussi une pratique performative. Au cours de nos recherches, nous avons collecté et travaillé avec différents types de cordages. Celles-ci allaient des cordes en fibres naturelles, préférées dans l'esclavage aux cordes de parachute colorées qui sont maintenant souvent utilisées pour fabriquer des bracelets, des cordes à usage domestique et des cordes utilisées par les alpinistes professionnels. Nous étions même curieux à un moment de travailler avec des câbles industriels utilisés pour des navires géants. Mais cela est devenu un défi logistique trop important pour nous et nous avons abandonné l’idée. Une corde possède à la fois des qualités esthétiques et énergétiques. C'est une ligne dans l'espace, autour d'un corps, entre des corps. Ca attire l'attention sur les relations spatiales et dynamiques. Mettre une corde sur un corps, c'est non seulement le retenir, mais aussi le parer; nouer la corde en lignes et en nœuds de manière à valoriser la force et la vulnérabilité du corps - la corde et le corps sont en communication et en communion. Le degré de tension de la corde en jeu contient une force - quelque chose à la fois très visible et ressenti par les personnes en contact avec la corde et le public.

Quel rôle joue le public dans Bunny ?

Luke George : Le public a plusieurs rôles: observateur actif, voyeur à distance, impliqué physiquement. Ces rôles ne sont pas définis et ne sont pas nécessairement interprétés de manière didactique. Les rôles fonctionnent à différents degrés de conscience, de comportement et de choix. Nous espérons que ces rôles et perspectives deviendront visibles tout au long de la performance. Bunny est un surnom donné à la personne qui est ligotée. Pour cette pièce, nous posons la question suivante: «Et si tout le monde (dans le théâtre) est un bunny?» Au début, on a l'impression que nous allons lier tout le monde, et au début de notre processus créatif, nous avons tenté cela, mais nous avons réalisé plus tard que vous pouvez être un bunny sans même avoir une corde sur votre corps. Nous parlons beaucoup de désir, individuel et collectif; le désir d'être attaché ou de regarder quelqu'un l'être et de se demander si vous aimeriez que ce soit vous, pour la tension, pour être taquiné, pour faire plaisir, pour faire ce qui est demandé, pour être récompensé, empathie et intimité, confiance et acquiescement. Tout au long de la pièce, nous «attachons» progressivement la salle; physiquement, psychologiquement et métaphoriquement. Nous impliquons le public et lui demandons de l'aider à faire en sorte que le spectacle continue et se déroule - parce qu'au début, nous sommes nous-mêmes liés et restreints - en effectuant des tâches simples; jouer de la musique sur un téléphone, faire tourner un artiste suspendu, nous attacher, nous lier. Le niveau et l'intensité de la participation augmentent en deux heures et deviennent des tâches très exigeantes qui ne sont possibles que grâce au développement progressif de la confiance et à la demande accrue. À la fin de la pièce, nous sommes souvent étonnés d’être aller aussi loin.

Daniel Kok : À un moment donné de notre processus de création, nous avons également réalisé que nous nous étions fixés un défi énorme: appeler le public et tous les acteurs du théâtre bunny, c’est jouer le rôle de dominateur et assumer le rôle de dominant. Ca nous est apparu comme une grande responsabilité. Nous ne pouvons plus simplement être ludiques à propos de cette notion. Nous avons fait notre lit et nous devons nous y coucher. Le public de Bunny se confie dans une large mesure à nous et s'attend à ce que nous les emmenions quelque part; un endroit stimulant et surprenant. Nous nous sommes demandés si nous avions avalé plus que nous ne pouvions mâcher. Pourtant, n’est-ce pas là le souhait ultime d’un artiste? Que le public lui fasse confiance pour qu’il lui donne ce qu’il ignore vouloir ? Dès que nous avons réalisé que c’était ce qui nous était demandé à cause de la question que nous avons posée, le sens des risques et le devoir de diligence s’élevaient. Nous devrions peut-être mettre de côté l’éthique du quotidien et nous lancer dans une sorte de jeu de rôle. Assumer le rôle de personne digne de confiance, capable de tenir le centre. Finalement, je peux dire qu’il y a eu des moments où Bunny est devenu pour nous deux une expérience intime enrichissante. Il est rare que les aspects intellectuels de mon travail convergent avec les aspects émotionnels et personnels.

Comment manipulez-vous le rôle de l’humain par rapport aux objets ? 

Luke George : Le décor de Bunny est un tapis bleu clair avec une série d’objets disposés dessus, comme un sol de salle d’exposition. Tout l’espace est éclairé par des LED qui rehaussent la palette de couleurs vives des cordes, des objets, des costumes et du maquillage. Les objets sont des objets de tous les jours : aspirateur, ventilateur, lecteur CD, extincteur, coussins, etc. Chaque objet est lié par des cordes colorées avec des nœuds précis appartenant au macramé, au shibari (ndlr: bondage japonais) et aux techniques de fabrication de filet. Nous considérons les objets comme des corps, et nous les attachons comme tels, nous les enveloppons avec les cordes, ce qui en fait de beaux objets de valeur. Tout au long de la pièce, Daniel entre en contact avec chaque objet, et a une connexion intime et sensuelle avec, l’active, et le met en marche. Le ventilateur en rotation émet un clic car il est retenu par une corde et ne peut pas bouger. Parallèlement à la relation de Daniel avec les objets, je suis en contact direct avec les gens, je les aborde et les invite progressivement, je les lie aux cordes et je les retiens. Nous avons également les objets pour montrer que les corps - nos corps et ceux du public - sont aussi des objets, à nouer et à façonner en quelque chose de beau.

Daniel Kok : Une découverte que j'ai trouvée intrigante est la façon dont la corde peut doter un objet lié - qu'il s'agisse d'un aspirateur ou d'un poulet du supermarché – d’une plus grande subjectivité. L'inverse est également vrai: un sujet humain ligoté est transformé en objet - mais cet objet ne réduit pas l'homme. Comme les gens et les objets sont attachés à vue dans Bunny, oscillant entre subjectivité et objectivité, j’aime à penser que l’empathie, ainsi que le désir, sont exacerbés; surtout lorsque le regard est collectif. Etre témoin du ligotement de quelqu'un ou de quelque chose suscite ces sentiments.

Quels sont vos projets pour la suite ? Prévoyez-vous de travailler encore autour de ce thème ?

Luke George : Les thèmes de l'intersubjectivité, de l'interactivité et de la dynamique de pouvoir entre l'artiste et le public sont primordiaux dans nos travaux et pratiques individuels. Notre collaboration a tellement bien fonctionné que nous ferons très probablement un autre projet ensemble dans un avenir proche, mais nous ne savons pas encore quand et ce qu'il en sera. Dans nos travaux, nous avons tous deux tendance à nous intéresser à de nouvelles idées pour travailler avec des physicalités et des matériaux particuliers. Par conséquent, savoir si la corde continuera à être le matériau sur lequel nous nous concentrerons est à réfléchir. Bunny suscite beaucoup d'intérêt. Jusqu'à présent, nous avons déjà présenté sept travaux internationaux. Plusieurs autres sont prévus pour 2017. En ce qui concerne notre relation personnelle au travail à la corde, elle a certainement eu et continue avoir son "chemin" avec nous. Nous sommes un peu accro à l'attachement et à l'attachement.

Daniel Kok : Je ne sais pas ce que nous pourrions ensuite faire. De la Lutte? Un défilé de mode? Quoi qu'il en soit, nous pourrions peut-être aller plus loin: traiter le même type de questions, par exemple la politique relationnelle et l'intersubjectivité, en touchant le public ou non, ou bien le faire participer. J'ai mal à la tête quand je pense à la façon dont cela pourrait fonctionner, mais j'espère que nous essaierons.

Entretien Daniel Kok / Luke George par Susanne Heinlein,
pour Form Magazine, septembre 2016

BunnyPresse

Ces points de connexion - manifestés dans les cordes et les attaches avec un air de rituel et de respect – montrent que Bunny met en valeur une chose trop rare au théâtre: un sens incarné d’engagement et de communauté. Ce n’est pas seulement le travail qui fait la performance; il souligne notre implication commune, transformant le rapport spectateurs-artistes, que nous soyons attachés ou non sur scène.
Non seulement l’œuvre nous implique entièrement mais elle souligne aussi notre participation collective, faisant des spectateurs des interprètes, peu importe qu’on soit ligotés sur la scène ou que l’on soit les observateurs. Bunny est une exploration intime de la confiance et du consentement ; art et sensualité, queer et jeu;  palpitant, exquis et convaincant.

 Richard Watts, Arts Hub (Melbourne)

Transgressif et vif, Bunny pose de nombreuses questions sur le consentement, la vie privée, la confiance, le pouvoir, la responsabilité collective et le libre arbitre. Néanmoins, son atmosphère est principalement sécurisante et, même si l’œuvre brise lentement les codes sociaux et théâtraux conventionnels, elle relie momentanément toutes les personnes présentes ; interprètes, participants, observateurs, d’une manière qui ne se voit pas. 

Ben Brooker, Real Time Arts (Adelaide)

Au-delà de l’érotisme, Daniel Kok explique que le travail consiste à la fois à «  donner son consentement, et à prendre le pouvoir. » (...) Mais en tant que pièce explorant la relation entre l'artiste et le public, Bunny est très efficiente. Le Bondage est une métaphore appropriée pour révéler et explorer les attentes et les engagements entre les deux parties. La relation artiste-public est consensuelle, les deux se permettant de rester dans le même espace, mais qui dicte vraiment le contenu artistique? L'artiste répond-il aux besoins du public ou le premier joue-t-il avec le second? Bunny en tant qu'œuvre pose toutes ces questions et plus encore. C’est un travail audacieux et évocateur, et (si vous vous permettez de lâcher prise) c’est un grand plaisir également.

Daniel Teo, https://magcul.net, avril 2016

Fils d'un postier, Kok est un ancien officier de l'armée et a déjà été champion de pole dance à Singapour. Vivant dans un pays où la "pseudo démocratie" est pratiquée et où l'argent est essentiellement attribué aux arts mais où la censure règne toujours, la politique est une partie importante de son travail. Dans Bunny, Kok pose une question d’éthique: «Quand un groupe de personnes se réunit, quelle concession, quel accord, partageons-nous d’un dénominateur commun?»  Plus que l'érotisme, le genre et la représentation sexuelle sont au centre de la pièce - elle dure deux heures et demi. En shibari, le «lapin» est attaché par le «rigger». (…) Un lapin évoque des images «d'une petite créature impuissante», note Kok. «Nous voulons créer la confusion avec ce. Bunny évoque joliment la culture queer – si j'ose dire - nous contrebalançons le caractère binaire habituel entre masculin, féminin, fort et faible.

Clarissa Sebag-Montefiore, The Guardian, janvier 2016

Portrait

Daniel Kok a étudié les beaux-arts et la théorie critique au Goldsmiths College (Londres, 2001), il a aussi étudié le solo, la danse, l'écriture au Centre interuniversitaire pour la danse (SODA, HZT, Berlin, 2012) et du Advanced Etudes de performance et de scénographie à Bruxelles (APASS, 2014). En 2008, il a reçu le Prix du Jeune Artiste du Conseil National des Arts (Singapour). Il est actuellement directeur artistique de Dance Nucleus, un espace pour la danse indépendante à Singapour. Q & A, Planète Romeo, Cheerleader of Europe, PIIGS, ALPHA, Bunny, MARK sont ses principales performances interprétées à travers l’Asie, l’Europe, l’Australie et les États-Unis. Ses recherches artistiques sur le spectateur critique l’ont conduit à s’intéresser aux «figures de performance» spécifiques telles que le danseur de pole dance, la pom-pom girl, le maître bondage ou le commandant militaire. Il étudie actuellement la notion de Trans-Individualité dans xhe, un spectacle de danse-installation d'une durée de cinq heures, créé avec l’artiste visuel Miho Shimizu (Tokyo) en octobre 2018 à Singapour et Sydney.

Élevé en Tasmanie et résidant à Melbourne, Luke George crée un nouveau travail en Australie, à l’internationale et interculturellement, par le biais de processus créatifs expérimentaux menés avec des artistes collaborateurs. Le travail de Luke George étudie les façons dont nous pouvons expérimenter la présence et le présent, pour trouver une autre manière d'exister. Il utilise des méthodes audacieuses et parfois peu orthodoxes pour explorer de nouvelles intimités et de nouveaux liens entre le public et les interprètes. Il souhaite offrir un espace créatif de rupture pour faire réfléchir et agir sur la manière dont nous pouvons être au monde et être les uns avec les autres. Son travail se fonde sur une recherche à long terme sur la «pratique de la performance relationnelle» qui est enracinée dans la chorégraphie, et s'engage avec d'autres formes d'art. Ses œuvres Public Action, Bunny (co-création Daniel Kok), Erotic Dance, Not about face, Now Now Now et Lifesize ont tourné dans toute l'Australie, le Japon, Singapour, la France, l'Allemagne, l'Autriche, l'Espagne, la Norvège, la Finlande, les Pays-Bas et les Etats-Unis.

BunnyGénérique

présenté avec le ThéâtredelaCité lors de la Biennale / Arts Vivants / International du 24 septembre au 12 octobre 2019
La Biennale est portée par 30 partenaires de la région toulousaine et soutenue par Toulouse Métropole, la Direction régionale des affaires culturelles - Occitanie, le Conseil Départemental de la Haute-Garonne, la Région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée.

conception et interprétation Luke George et Daniel Kok
dramaturgie Tang Fu Kuen
création lumières Matthew Adey / House of Vnholy
régie plateau Gene Hedley
production Alison Halit
avec le soutien du gouvernement australien via le Australia Council, le Gouvernement de l’État de Victoria via Creative Victoria, et le National Arts Council de Singapore

Bunny est présenté en France dans le cadre de la plateforme Australia Express accueillie à Toulouse (théâtre Garonne – scène européenne & Festival La Biennale / Arts vivants / International, et le ThéâtredelaCité).
production déléguée en France théâtre Garonne – scène européenne conseil artistique et production pour l’Australie Alison Halit avec le soutien du gouvernement australien à travers le Australia Council, le Gouvernement de l’État de Victoria à travers Creative Victoria, et le National Arts Council de Singapore et de l’ONDA – Office National de Diffusion Artistique
Bunny est une commande du Campelltown Arts Centre (Australie) et est  coproduit par le Substation (Singapore)

Intimacy

Ranters Theatre [Australie]

"(...) Pourquoi est-il parfois plus facile d'être honnête avec un étranger qu'avec quelqu'un que nous connaissons? Intimacy  s'intéresse aux révélations personnelles et souvent très intimes qui se produisent lorsque des inconnus se rencontrent."

The Street

A Melbourne, Fitzroy Street est une place incontournable de la vie nocturne, avec ses bandes de fêtards, ses bars à concert, ses discothèques et autres lieux de loisir. C’est là qu'Adriano Cortese, directeur artistique et dramaturge de Ranters, a choisi de rencontrer de parfaits inconnus, le temps de vider quelques verres, et d’échanger quelques confidences… Au gré de ces rencontres de fortune, des familiarités éphémères se nouent, des secrets se révèlent, des éclats de vie illuminent la nuit…
Cortese et les membres de la compagnie ont écrit le texte d’Intimacy, qui raconte tout autant de ces « intimités » qu’il pose de questions éminemment liées au théâtre : qu’est-ce qui pousse des étrangers à ce degré de sincérité, ou – c’est selon – de mythomanie ? Que livre-t-on de soi-même lorsqu’on se raconte ? Quelle part de vérité ? De mensonge ? De mise en scène – plus ou moins volontaire ? Et comment cette étrangeté transforme ceux qui la croisent ? Quelque part entre tg STAN (pour le jeu des acteurs) et Forced Entertainment (pour la qualité de l’écriture), Ranters est une compagnie emblématique de la scène australienne. De ce point de vue, Intimacy est d’une certaine façon la quintessence de leur art : dans un décor réduit à l’extrême, trois acteurs brillants semblent improviser un texte constitué d’anecdotes drôles, touchantes ou simplement absurdes : pour, au final, mettre en lumière l’attachante (mais trouble) intimité d’une humanité dont les spectateurs se délectent peu à peu de devenir les voyeurs…

Théâtre
17 > 19 Octobre
jeu 17 oct / 19:00ven 18 oct / 19:00sam 19 oct / 19:00
théâtre Garonne

durée 1h10
en anglais surtitré en français
de 10 à 25 €
IntimacyPresse

Nos amis proches reflètent qui nous voulons être ; nos connaissances, ce que nous pourrions devenir ; notre famille, ce qui nous a fait. Mais seul un étranger peut révéler qui nous sommes vraiment.
Adriano Cortese

Pour Liza Powers, du quotidien The Sydney Herald Tribune, les acteurs Beth Buchanan et Paul Lum reviennent sur la genèse de Intimacy.

Le travail a été inspiré par une nuit durant laquelle deux amis ont décidé de se lancer dans une expérimentation sociale.

"Ca consistait essentiellement à errer dans Fitzroy Street (une rue très fréquentée par les noctambules), rencontrer un groupe de personnes, les ramener à l'appartement et organiser une sorte de fête", raconte Paul Lum. Au milieu des festivités, l'un des deux amis, le metteur en scène Adriano Cortese, a été saisi par la nature débridée des échanges entre les gens. "Il a été vraiment surpris de voir à quel point les gens étaient disposés à révéler des détails très personnels sur leur vie."
Cette nuit a incité Cortese à réfléchir à la manière dont ces étrangers s'étaient liés, libérés des barrières sociales et des conséquences de leur rencontre. Il a réfléchi à la manière dont notre comportement vis-à-vis de proches, amis, collègues ou amants suit des codes établis au fil du temps ; aux rôles que chacun de nous joue dans sa propre vie. Face à des étrangers, nous pouvons montrer un type de "moi" différent : la personne que nous voulons être à ce moment particulier. Peut-être que c'est seulement en compagnie d'étrangers que nous sommes vraiment nous-mêmes.

Le personnage principal dans Intimacy, c'est donc un homme solitaire qui sort de son appartement pour errer dans la nuit et parler à des gens rencontrés par hasard. "Certaines conversations ont lieu dans la rue, d’autres dans un café, un bar karaoké, sur la plage. La pièce est comme un documentaire remettant en scène certaines de ces conversations qui ont réellement eu lieu.''

Pour ceux qui connaissent les œuvres de Ranters Theatre, une pièce qui se déroule au travers de conversations apparemment "quotidiennes" ne sera pas une surprise. Dans Holiday, deux acteurs en bermuda papotaient autour d'une piscine gonflable. Dans Affection, les acteurs se retrouvaient dans un salon meublé d'un canapé et d'un clavecin pour badiner sur des sujets apparemment sans importance. Aucune de ces pièces ne suit un récit conventionnel ou une intrigue. Les acteurs se contentent de rester assis en de discutant de la vie, de philosophie, du travail, et, à travers le rythme des discussions et les sujets abordés, le public peut s'immerger autant - ou aussi peu - qu'il le souhaite.

Si "hyper réalisme" est le terme favori des critiques pour décrire le style de la compagnie, ses membres sont moins intéressés par les distinctions critiques que par la création de ce qu'ils appellent un "espace de vie", une façon d’immerger les spectateurs pour leur faire partager idées et thèmes. "Les gens sont vraiment conditionnés à certains modes de narration et de jeu", dit Beth Buchanan. ‘ Souvent, vous pouvez prédire la fin d'une pièce dès le milieu de la première scène. Et il y a un code de réception au théâtre – 'ceci n'est qu'une représentation, donc ça ne nous engage pas plus que ça' – qui nous donne envie d'enfreindre ces règles. Il s’agit également de briser nos habitudes de jeu, d’être présents et suffisamment ouverts pour vivre une expérience collective."

Intimacy est le produit d'un long processus de développement. Le texte, d'abord écrit par Raimondo Cortese, est basé sur un jeu de rôle : les conversations étaient jouées, échangées entre les acteurs puis réécrites. Cette approche collaborative est au cœur du travail de la compagnie. Chaque membre de Ranters a ainsi été amené à explorer sa propre notion de ce que peut être l'intimité. "Les gens pensent immédiatement à des clichés comme, par exemple, deux amants qui parlent de leur vie affective, mais l'intimité et la proximité réelles peuvent survenir en bien d'autres circonstances, et vous pouvez les ressentir de différentes façons."

À l’ère de la télé-réalité, de Facebook, Twitter, etc., la notion même d'intimité est devenue une énigme, où suivre minute par minute le quotidien d'individus – une expérience qui, il ya moins d’une décennie, pouvait encore être considérée comme intime – est désormais un fait banal. Paul Lum suggère que cette ''marchandisation de l'intimité ' crée un dilemme plus grand encore, en ajoutant une couche supplémentaire de "performance" lors de laquelle les gens adaptent, affinent et masquent leur identité.

Buchanan cite une interview du peintre Lucien Freud, qui s'abstient de peindre des modèles vivants pour réaliser ses portraits. "Il a l'impression qu'ils ont une seconde peau sur eux, qui l'empêche de les voir vraiment." Comme avec Facebook, peut-être, où les profils des gens représentent un autre type de portrait. ''D'un côté, il s'agit de vous exposer, mais de l'autre, c'est une sorte de retraite, la projection d'une personne que vous souhaiteriez être, ou les morceaux choisis d'une personne que vous n'êtes que de temps en temps.''

Paul Lum dit que l'illusion d'intimité nourrie par les nouvelles technologies peut peut-être se résumer à cela. ''Dès que vous essayez de contrôler ou mettre en scène l'intimité, elle disparaît. L'essence même de l'intimité repose justement sur le fait d'être en relation avec une personne particulière, à un moment particulier. Et vous ne contrôlez pas ces moments d'intimité réelle ; vous devez vous laisser aller. C'est le pivot de toute la pièce. C'est aussi ce qui nous arrive sur scène en tant qu’acteurs, avec les spectateurs. Nous sommes à la recherche de ce moment.''

 

"Ce qu’Intimacy fait si bien, c’est de donner l’impression que tout est naturel. La direction sobre et précise d’Adriano Cortese va droit au but. Tous les éléments : mise en scène, éclairage, son, sont discrets et parfaitement amenés. C'est l'un des spectacles les plus intelligents et les plus plaisants que vous verrez avant un moment."

Prue Bentley, abc.net.au , 2015

 

"La performance a la qualité d’une conversation naturelle et douce, rarement vue au théâtre. Le jeu est subtil, ça n’est pas surjoué et le spectacle fait écho aux échanges décontractés, ponctués de silences du dialogue quotidien. (...) Intimacy nous permet d'entrer dans des mondes auxquels nous n’avons habituellement pas accès. Nous sommes comme des villageois autour d’un feu de camp, écoutant des histoires qui animent et éduquent, nous rendant alertes et plus sensibles les uns aux autres."

Kate Herbert, 2015

 

IntimacyPortrait

Fondée en 1994 par Adriano Cortese et Raimondo Cortese, le collectif Ranters Theatre est une figure essentielle de la scène australienne. Plus de vingt productions et plusieurs prix l’ont rendu célèbre sur les scènes et festivals du monde entier, hormis en France où ils viennent pour la première fois. Ils mènent un travail intrinséquement lié aux contextes sociaux et psychologiques actuels. "Comment faisons-nous l'expérience de nous-même?", ou encore "comment accomplissons-nous nos vies?" sont des questions qui se situent au coeur de leurs recherches. 

IntimacyGénérique

conception Ranters Theatre
écrit par Beth Buchanan, Adriano Cortese, Raimondo Cortese, Paul Lum and Patrick Moffatt
mise en scène Adriano Cortese
interprètes Beth Buchanan, Adriano Cortese, Patrick Moffatt
lumières Govin Ruben
vidéo Keri Light
chorégraphie (Beth’s Dance) Alison Halit
avec le soutien du gouvernement australien à travers Australia Council, le Gouvernement de l’État de Victoria à travers Creative Victoria
production déléguée en France théâtre Garonne - scène européenne, Toulouse
conseil artistique / production pour l’Australie Alison Halit soutenu par a Malthouse Theatre and Melbourne International Arts Festival Commission, the Victorian Government, through Arts Victoria and Arts House, Australia Council

Terror Australis

Leah Shelton [Australie]

"Ce spectacle ne se contente pas de repousser les limites : il les dynamite." – The Creative Issue Magazine

Bienvenue en Australie, ses majestueuses immensités désertiques, sa prodigieuse faune, et sa culture unique au monde. Mais attention : ici, faire du stop peut vous coûter la vie, prendre la voiture signifie souvent finir dans un amas de tôles, et être proche de la nature peut impliquer de se faire dévorer vivant par un dingo ou égorger par un kangourou contrarié. Le bien nommé Terror Australis vous embarque dans un road trip sauvage et échevelé à travers le pays, télescopant avec fracas tous les stéréotypes plus ou moins flippants – notamment ceux que le cinéma de genre australien a largement exploité, de Crocodile Dundee à Pique-nique à Hanging Rock – et la véritable culture locale, majoritairement mâle, blanche, et volontiers violente. Au fil de scènes montées comme des numéros de cabaret burlesque (faux-cils, strass et Pole dance), vraie bière et faux sang coulent à flot dans un paroxisme volontairement kitsch, les crocodiles sont en plastique gonflable et les dialogues tout en toc. Mais au-delà des clichés hilarants (ou éprouvants), Leah Shelton, issue de la scène underground et interprète retorse au charisme étourdissant, parvient à transformer l’improbable cauchemar de cette jeune femme en proie à un environnement hostile, en un percutant manifeste féministe. Et, au terme du voyage, à nous plonger dans la psyché d’un continent entier : bienvenue en Australie (et bonne chance…).

théâtre - cabaret
18 > 19 Octobre
ven 18 oct / 21:00sam 19 oct / 21:00
théâtre Garonne

durée 45'
En anglais surtitré en français
de 10 à 25 €
Terror AustralisEntretien

1- Quel est votre parcours artistique ?

Je mène des projets féministes stylisés, bruts et rebelles, imprégnés de références cultes et d'humour noir. Mon parcours m’a fait passer des émissions de variétés glamour de Las Vegas à la performance interactive dans les rues de Kings Cross; et d’une formation intensive au Japon à des festivals d’art à New York. Formée à la danse contemporaine à l'origine, j'ai passé plus de dix ans à apprendre la méthode de formation d'acteurs Suzuki. Cette approche intensive de la performance physique sous-tend une grande partie de mon travail. Je suis également codirectrice du collectif d'artistes Polytoxic, l'une des compagnies de théâtre contemporain interculturelles et du Pacifique les plus en vue en Australie. Avec Polytoxic, j’ai créé des œuvres en tournée internationale, notamment The BackUp Service (une expérience de karaoké participative et live) et Trade Winds (une performance de danse / projection watertop spécifique à un site). En tant qu'artiste solo, j'ai foulé les scènes de cabaret de La Clique (Edimbourg, Brighton) et Vegas Nocturne (Las Vegas), mêlant magie, clown, synchro labiale et pole dance. Mon premier travail solo, Terror Australis a été créé en 2016 et a depuis tourné dans toute l’Australie, remportant de nombreux prix. Mon deuxième solo, Bitch On Heat, dirigé par UK Performance Art Luminary, Ursula Martinez, a récemment été salué par la critique, et The Age a déclaré "ne perdez pas un seul instant - une combinaison captivante d'intelligence féroce, de présence intense et une comédie physique audacieuse. "

2- Quelle est la genèse de Terror Australis?

Terror Australis est une réponse à une vision du monde monoculturelle et nationaliste qui a tendance à s’imposer de plus en plus, tant en Australie que dans le monde entier.  Je souhaite savoir en quoi cette vision autocentrée se fonde sur une peur de «l’autre» et sur la manière dont cette peur et cette paranoïa sont représentées dans la culture dominante. Cette crainte est flagrante dans les films australiens, comme ceux d'exploitation et d’horreur / thrillers australiens, et dans les films emblématiques tels que Wolf Creek, Crocodile Dundee et Picnic At Hanging Rock - des films se déroulant dans un paysage étrange de tueurs en série et d’ accidents de voiture, d'animaux morts et de femmes hurlantes, de paranoïa, de sueur et d'alcool fermenté. Terror Australis est une critique politique de l'iconographie australienne - la brutalité du nationalisme, de la colonisation, du racisme et de la misogynie, fabriquée par notre culture populaire dominante. À travers la comédie, le cabaret et le ridicule, je reproduis et présente des clichés et des stéréotypes, invitant le public à rire des tropes culturels emblématiques tout en me demandant pourquoi nous rions et pourquoi ces clichés sont relayés.

3- Dans Terror Australis, votre corps donne l'impression de tout pouvoir incarner, représenter autant qu'il détruit et expie ces incarnations. Est-ce que ça a un lien avec la figure de la psycho-sirène dont vous parlez ? D'ailleurs qu'est-ce qu'une psycho-sirène?

La psycho-sirène est pour moi une récupération du corps féminin objectivé et brutalisé. C'est une figure très théâtrale et via la performance, elle fracture et re-présente des tropes iconiques, tout en approfondissant les concepts qui sous-tendent ces stéréotypes. Elle combine hommages, critiques, colère, émeute et célébration. J’explore le corps féminin médiatisé dans les domaines du cinéma, de la politique et de la culture schlock / pop, et à travers la performance, je tente de déconstruire la misogynie enracinée dans la culture contemporaine occidentale. Subvertir les images populaires m’intéresse profondément, notamment en utilisant la parodie et l'exagération pour critiquer les messages culturels auxquels nous sommes soumis quotidiennement.

4- C'est la première fois que vous venez en France, comment appréhendez-vous la tournée?

Voir comment le public français va réagir à Terror Australis, m’intrigue! La performance contient tellement d'icônes australiennes - c'est un mélange de toutes les choses terrifiantes de notre culture - alors je suis impatiente de partager ces histoires d'auto-stoppeurs en voie de disparition et d'attaques de crocodiles. 

Entretien de Leah Shelton réalisé par Pauline Lattaque, juillet 2019

 

Terror AustralisPresse

« Leah Shelton est sensationnelle – sensuelle, érotique et un peu folle. »

Tsunami Magazine

« Terror Australis fait jaillir le sang de la brousse australienne… énergique, excitant, horrible, beau… »

Rip It UP

« Leah Shelton joue sa comédie physique de façon spectaculaire, ne prononçant jamais un mot, tout en entraînant le public dans le ventre sale et grunge de la pop-culture australienne.»

Hitlist – BEST CABARET – Adelaide Advertiser

« Dans Terror Australis, le beau corps noir poli est remplacé par le corps politique de la culture australienne traditionnelle, et donne à l’œuvre une énergie brute et gutturale - une critique politique déchirante sur la brutalité de la culture populaire masculine australienne. Mais ce n'est pas seulement une déconstruction froide et lointaine. Shelton nous donne la permission d'aller avec elle au cœur de cette violence et de savourer sa performativité tout en étant témoin de sa misogynie et de ses excès. »

Kathryn Kelly, realtimearts.net

Terror AustralisPortrait

Le travail de Leah Shelton se situe à mi-chemin entre le cabaret alternatif, le théâtre physique et le art live. Formée à la danse à l’origine, son parcours artistique témoigne d'une grande diversité, ce qui lui a valu de se produire aux États-Unis, au Canada, en Europe, au Royaume-Uni, au Japon et dans le Pacifique Sud, notamment dans le cadre de festivals comme le PS122 COIL Festival NYC (Vallejo Gantner, directeur artistique); Harbourfront Festival Planet IndigenUs Festival, Toronto, Canada; Shizuoka Spring Arts Festival (directeur artistique Tadashi Suzuki); et elle a travaillé avec des compagnies telles que PVI Collective, The Good Room, Phluxus2, Frank Theatre, Lala Parlour, Bonemap, Superhero Clubhouse (NY), Spiegelworld (Etats-Unis), La Clique (UK) et SITI compagnie (NY). Leah est également codirectrice du collectif d'artistes Polytoxic, l’un des plus importants du théâtre contemporain  du Pacifique, en Australie (www.polytoxiclovesyou.com). En tant qu’artiste solo, Leah crée des travaux stylisés, gutturaux, superbement féministes imprégnés de références cultes et d'humour noir. Elle a travaillé pendant plus de dix ans avec la méthode SUZUKI, formation intensive pour acteurs à Brisbane et au Japon, et elle a honoré de sa présence les scènes de cabaret de La Clique (Édimbourg, Brighton) et de Vegas Nocturne (Las Vegas). Elle est actuellement en tournée avec son solo primé, Terror Australis, qui a reçu une nomination au Green Room du meilleur interprète contemporain et expérimental; Prix Adelaide Fringe Innovation, Prix Darwin Fringe du meilleur cabaret, Prix Matilda du meilleur décor et nominations au meilleur cabaret, au meilleur design de costume et au meilleur audiovisuel.

Terror AustralisGénérique

conception, interprétation Leah Shelton
collaboration artistique Daniel Evans
création sonore Kenneth Lyons
création vidéo Optikal bloc
création lumière Jason Glenwright
création costumes et scénographie Leah Shelton
assistante à la dramaturgie Saffron Benner
régisseur plateau Justin Marshman
voix off Margi Brown Ash, Leon Cain, Caroline Dunphy
technicien Justin Marshman
production Alison Halit
avec le soutien du gouvernement australien via le Australia Council, le Gouvernement de l’État de Victoria via Creative Victoria
Terror Australis est présenté en France dans le cadre de la plateforme Australia Express accueillie à Marseille (Festival actOral – Montevideo), Aix-en- Provence (théâtre du Bois de l’Aune), Bordeaux (Festival des Arts de Bordeaux – Théâtre du Pont tournant), Aubervilliers (théâtre de La Commune – Festival d’Automne à Paris), Toulouse (théâtre Garonne - scène européenne, Toulouse & Festival La Biennale - ThéâtredelaCité 
production déléguée de la tournée théâtre Garonne - scène européenne, Toulouse 
conseil artistique / production pour l’Australie Alison Halit 

Fantastique australien

Plongée dans le cinéma fantastique australien, une approche singulière du genre profondément ancrée à son territoire : de sa topographie (espaces isolés et sauvages) à sa culture (cohabitation d'une culture native ancestrale et d'une culture européenne colonisatrice). Avec sa faune et sa flore spécifiques, sa rudesse, sa mythologie aborigène qui flirte avec la magie et une colonisation marquée par la violence, le cinéma australien a inventé un fantastique qui prend directement racine dans la nature. Dans sa nature. Habituellement, dans le genre la nature est le théâtre du fantastique. Dans le cinéma australien, elle en devient actrice. D'un cri dans la nature au cri de la Nature, le cinéma fantastique australien serait-il écologiste sous ses airs de fin de monde ? Prémonitoire...

Programmation en cours, établie avec la complicité de Leah Shelton

Long week-end de Colin Eggleston (1978)
Walkabout de Nicolas Roeg (1969)
The Last Wave de Peter Weir (1977)
Wake in fright de Ted Kotcheff (1971)
The Cars that ate Paris de Peter Weir (1974)
Picnic at Hanging Rock de Peter Weir (1975)
Razorback de Russell Mulcahy (1985)
Roadgames de Richard Franklin (1981)
Night of fear de Terry Bourke (1972)
Mad Max de George Miller (1979)
The Survivor de David Hemmings (1981)
Fair Game de Mario Andreacchio (1986)

cinéma
19 Novembre > 19 Décembre
à la Cinémathèque de Toulouse

Les leçons du Federal Theatre Project

LES LEÇONS DU FEDERAL THEATRE PROJECT
L’économie et la culture aux USA, en France et en Australie
19 octobre, 11h30-16h00 / Débats et tables rondes

Les 17 et 18 octobre à la Maison de la recherche de l’Université Toulouse Jean Jaurès, le colloque international interdisciplinaire « Federal Theatre Project, contexte et enjeux » sera l’occasion de remettre en lumière un épisode fondamental, pourtant largement passé sous silence, de la politique culturelle américaine. Et, durant la journée du samedi 19, de faire le point sur la place que la société accorde aujourd’hui aux artistes, aux Etats-Unis, en France et en Australie – en présence d’observateurs et d’acteurs issus de ces différentes cultures.

Colloque organisé par le laboratoire CAS de l’Université de Toulouse Jean - Jaurès et le laboratoire HAR de l’Université Paris Nanterre / Journée du 19 pensée avec les étudiant-e-s du M1 EEI de l’INU Champollion.

Partenaire du colloque, le théâtre Garonne accueillera trois conférences et tables rondes, en invitant parmi les divers intervenants certains artistes australiens présents à Toulouse :

- 11:30 - 12:30 Le financement de la culture aujourd’hui : des clés pour comprendre.

Financement des arts vivants en France : interventions de Stéphane Gil, Directeur délégué Théâtre de la Cité, Stéphane Boitel, Co-programmateur au Théâtre Garonne
Financement des arts vivants aux Etats-Unis : intervention de Rima Abdul-Malak, Attachée culturelle à l’Ambassade française aux USA (jusqu’en 2018)
Financement des arts vivants en Australie : intervention de l’attachée culturelle australienne de l’ambassade de Paris (participation à confirmer)

- 14:00 Crise & financement de la culture: interventionnisme étatique ou américanisation de la  culture ?

table ronde avec :
Emmanuel Wallon, Professeur de sociologie politique (Université Paris-Nanterre), Christian Biet, Professeur d’histoire et d’esthétique du théâtre (Université Paris-Nanterre), Eric Fourreau, Consultant et directeur des éditions de l’Attribut et de la revue NECTART, Stéphane Boitel, Co-programmateur au théâtre Garonne, Stéphane Gil,Directeur délégué du Théâtre de la Cité, Rima Abdul-Malak, Attachée culturelle à l’Ambassade française aux USA (jusqu’en 2018), l'Attachée culturelle australienne de l’ambassade de Paris (participation à confirmer)

- 15:00 Paroles aux artistes : comment les politiques financières influencent la création.

table ronde avec :
Alison Halit, Productrice et curatrice, Adriano Cortese, Cie. Ranters Theatre, Leah Shelton, Cie. Terror Australis, Aurélien Bory, Metteur en scène, directeur de la Nouvelle Digue (Toulouse, France) (participation à confirmer)

Colloque interdisciplinaire organisé par Histoire des Arts et des Représentations (HAR, EA 4414, Paris Nanterre), Cultures Anglo-Saxonnes (CAS, EA 820, Toulouse Jean Jaurès). Partenaires CRPS, Université Toulouse Jean Jaurès, INU Champollion, Dickinson College, Toulouse, American Theatre and Drama Society, International Susan Glaspell Society, théâtre Garonne.

colloque
19 Octobre
au théâtre Garonne

durée 1 journée

Entretien d'Alison Halit, programmatrice d’Australia Express, juillet 2019

 

Quel rôle jouez vous dans la programmation d’Australia Express ? Comment s’est fait le choix des artistes ?

J'ai joué le rôle d'une co-programmatrice du projet avec Stéphane Boitel, programmateur du théâtre Garonne. Plus précisément, il était de ma responsabilité de déterminer comment mettre en route le projet du point de vue australien sur les plans artistiques, culturels, logistiques et financiers. Ayant travaillé en tant que productrice et curatrice dans le domaine des tournées internationales pendant plus de 15 ans, je comprends très bien comment faire tourner des œuvres australiennes. Ces dernières années, cela a conduit à plusieurs collaborations interculturelles de grande envergure. Il est toutefois important de noter que mon rôle principal dans Australia Express consistait à comprendre comment les choses fonctionnent du point de vue français, pour ensuite définir et cartographier avec Stéphane Boitel la manière dont nous pourrions faire collaborer nos deux pays. En particulier, lorsque des problèmes très pratiques nous en empêchaient. Par exemple, Les délais français (tardifs) pour choisir les projets artistiques et les échéances australiennes (précoces) pour l’attribution des subventions de mobilité des artistes sont diamétralement opposés, et c’est ce décalage initial qui a constitué la plus grosse difficulté à surmonter pour élaborer Australia Express.

Le choix des artistes ?
Stéphane et moi nous sommes rencontrés à Bergen, à Oktoberdans, en 2012. J'étais en tournée avec Luke George et ses collaborateurs pour NOW NOW NOW. J'étais auparavant la productrice exécutive des Ranters (qui fait également partie d’Australia Express), et de nombreux collègues m'avaient suggéré de le contacter car le théâtre Garonne aurait pu être intéressé par le travail des Ranters… Après l'Oktoberdans Stéphane m’a demandée de le tenir au courant des tournées d'artistes en Europe. Nous avons rapidement découvert qu'il y avait une réelle synergie entre le portefeuille d'artistes que je gérais et la programmation artistique défendue et portée par le Garonne. Au fil du temps, nous avons développé une vision commune autour du soutien d’artistes et du travail et nous avons trouvé intéressant d’organiser une tournée en France. Nous avons ensuite convenu d’une sélection d’œuvres à partager avec les partenaires d’Australia Express (salles et festivals).

En ce qui concerne les œuvres choisies, nous avons laissé les partenaires français nous indiquer quels travaux les intéressaient le plus et nous avons finalement abouti à un consensus.  Malgré le processus, Stéphane et moi-même avons travaillé pour donner à chaque lieu et chaque festival une compréhension de la scène artistique australienne afin de leur permettre, espérons-le, de prendre des décisions avec le contexte en tête. Je pense que nous aurions tous deux aimé travaillé plus en direct - et, finalement, que les programmeurs français se soient rendus en Australie afin de développer leur compréhension de la culture et de l’art australiens - j’espère sincèrement que cela se produira à l’avenir.

 

Quelles sont vos attentes concernant cette collaboration Franco-australienne ? Et plus généralement, des collaborations internationales que vous avez déjà menées ?

Je crois fermement aux performances que nous faisons tourner et aux artistes qui ont créé ces œuvres. Les lieux et les festivals dans lesquels nous allons tourner m’impressionnent et je pense que l’alliage de ces trois propositions artistiques est tout à fait pertinent. Les artistes d’Australia Express sont très expérimentés et ont beaucoup voyagé. Ils sont donc en mesure de présenter leur pratique artistique et leurs méthodes de travail dans différents contextes culturels.
Pour nous, les Australiens et aussi pour nos voisins asiatiques, la scène artistique française rayonne et le nombre de festivals, de théâtres nous impressionnent. Nous respectons profondément la valeur que la France attache à l'art et à la culture et nous la considérons également comme un pays politiquement progressiste, même si, au fil de mes nombreuses années de voyage en France, je constate que les choses changent.
Je pourrais en dire beaucoup plus sur tout cela, mais mon plus grand espoir est que les artistes français viennent voir les spectacles d’Australia Express, et que peut-être de nouvelles amitiés et collaborations puissent voir le jour. C’est un grand pas pour la circulation des œuvres et de la scène australienne en France, et je remercie le théâtre Garonne d’avoir permis cette extraordinaire opportunité. Il me tarde de voir où tout cela mène et je ferai mon possible pour permettre d’autres collaborations entre l’Australie et la France.

Quel est l’état de la culture en Australie ?

C’est une autre question colossale qui mérite de nombreuses réponses… et plus de temps et d’espace que ce que nous avons actuellement. En bref, je pense que cela dépend beaucoup de la région dont vous êtes originaire. La culture et la qualité de vie aussi. Peut-être que les œuvres programmées dans Australia Express rendent visible ce constat?
Terror Australis de Leah Shelton raconte des histoires de l’arrière-pays, des régions plus isolées de l’Australie où la vie peut être brutale. Leah nous présente une expérience féminine (et de la féminité à travers les sexes et de notre culture plus largement) dans une région rude de l’Australie, avec la musique emblématique (hymnes du rock), des mythes urbains, des films des années 70’s et 80’s en grande partie. Tout ce avec quoi nous avons grandi. Je pense que l'expérience de Leah en tant qu'artiste basée dans le Queensland est également révélatrice, elle est exposée à une Australie différente de celle des Ranters basés à Melbourne (une ville très sophistiquée investissant beaucoup dans l'art et la culture), bien que Brisbane, la ville natale de Leah, évolue également et se développe culturellement à un rythme rapide.
Dans le cas des Ranters, Intimacy, nous sommes plongés dans la simplicité d’un vendredi soir, dans une rue emblématique (St Kilda street), une espèce « de rue de la soif ». Au gré des rencontres et des conversations, nous sommes face à des révélations intimes qui révèlent la complexité de la vie urbaine contemporaine australienne. Ce qui, je pense, est en partie lié à notre histoire de colonisés, à notre isolement et aussi à notre multiculturalisme (entre autres). Et à propos de la colonisation, je souhaite rendre hommage aux « gardiens traditionnels de l’Australie », et à leur histoire ancienne et riche sur le plan culturel, portés par leurs aînés, passés, futurs et émergents. Parmi de nombreuses célébrations, nous organisons un festival semestriel d'art de la performance contemporaine appelé « YIRRAMBOI, Festival des Premières nations » : https://yirramboi.net.au et j'espère que nous pourrons permettre aux professionnels français d'assister aux futures éditions. 
Enfin, avec BUNNY, nous voyons une collaboration interculturelle entre un artiste singapourien et un artiste de Melbourne. En tant qu’œuvre sur les politiques relationnelles, les dynamiques de pouvoir, la confiance, le consentement, l’acquiescement, BUNNY commence à illustrer sa capacité à une politique de la prochaine vague fondée sur l’inclusion et la communauté en embrassant la différence et le principe de l’autre. Je pense vraiment que l'Australie contemporaine a la capacité réelle de suivre des voies socioculturelles et politiques très différentes, dont l'essentiel est en partie fondé sur le fait que la terre n'a pas été dominée par un patriarcat, depuis 3000 ans avant JC comme c’est le cas dans certaines parties du monde. Ok, c’est une analogie très simpliste, mais venez passer du temps en Australie, avec les Australiens, et vous vous rendrez vite compte que notre voix féministe est forte.

propos recueillis par Pauline Lattaque