Tierras del Sud

Dossier de presse

Tierras del sud

Azkona Toloza [Espagne]

J'ai écrit à partir de la douleur, mais notre devoir est la joie. J'ai écrit à partir de la haine, mais notre devoir est l'amour.
Raúl Zurita, poète chilien, 2016

Les mapuches ont lutté face à un capitalisme débridé et d’une violence sans retenue. Aujourd’hui, le théâtre se saisit avec ses modestes outils. À travers cette performance-documentaire, Laida Azkona Goñi et Txalo Toloza-Fernández donnent à voir et à entendre un voyage au cœur d’un continent, d’un territoire, d’une culture avec un sens du minimalisme fabuleux. Au plateau, rien n’est spectaculaire, tout est symbolique, l’essence de la chose théâtrale s’offre généreusement à nous. Ces arpenteurs d’histoires humaines retracent l’histoire de la Patagonie, région d’Argentine, avec comme point de départ, le processus de récupération des terres ancestrales vendues aux puissances étrangères. Deuxième volet de la trilogie PACÍFICO, Tierras del Sud aborde les nouvelles formes de colonialisme et la violence qu’elles provoquent en évoquant la résistance des mapuches contre l’oppression de l’empire Benetton. Chez les mapuches, littéralement « Peuple de la terre », présents depuis des siècles, la propriété n’existe pas : l’homme appartient à la terre et non l’inverse. Ce sont des protecteurs de la nature, et résistants légendaires qui sont parvenus à stopper la conquête ibérique et à obtenir certaines garanties pour le respect de leurs droits fondamentaux.

Théâtre
17 > 19 Septembre
jeu 17 sep / 20:00ven 18 sep / 20:00sam 19 sep / 20:00

durée 1h45
en français, espagnol, surtitré en français
Production déléguée / 1
Tarifs de 10€ à 25€
Tierras del sudEntretien

La compagnie Azkona Toloza du nom des deux artistes performeurs catalan et chilien qui la dirigent est accompagnée cette saison 2020-2021 par le théâtre Garonne. Coproducteur de la dernière partie de leur trilogie documentaire Pacifico, Garonne présente aujourd’hui leur deuxième volet Tierras del Sud.

Laida Azkona, vous êtes danseuse et Txalo Toloza Fernández, créateur audiovisuel. Quel langage commun avez-vous créé tous les deux ?

Laida Azkona : Notre projet est transdiciplinaire, ouvert aux arts vivants. Notre travail sur la trilogie Pacifico nous a permis de trouver petit à petit notre langage, qui est très audiovisuel. Txalo et moi n’avions jamais fait ce genre de documentaire scénique auparavant. Nous concevons la scène comme une suite de plans-séquences cinématographiques. Dans ce même esprit, nous créons sur le plateau des installations qui donnent forme à des paysages.

Comment s’inscrit cette deuxième performance Tierras del Sud dans votre trilogie Pacifico ?

Le projet Pacifico est une recherche sur les relations de l’histoire latino-américaine avec les nouvelles formes de colonialisme. Lorsque nous avons commencé à travailler sur la première pièce, nous ne savions pas que cela deviendrait une trilogie. Txalo est Chilien, il vient du désert d’Atacama. En faisant des recherches sur ses origines, nous avons appris que la famille américaine Guggenheim s’était installée dans cette région et y possédait des industries minières. Le père de Txalo lui travaillait dans une entreprise de salpêtre. Il nous a semblé intéressant d’éclairer la manière dont l’histoire de l’art avait croisé à un moment l’histoire familiale de Txalo. C’est ainsi qu’est né en 2014 le premier volet de la trilogie : Extraños mares arden (D'étranges mers brûlent). L’industrie de l’art contemporain s’est toujours développée dans le contexte du colonialisme. Actuellement, il existe un conflit dans la Patagonie argentine entre un couple Mapuche et le groupe Benetton, propriétaire d’un million d’hectares de terres appartenant ancestralement aux Indiens Mapuches. Au fur et à mesure de notre enquête, nous avons eu envie de raconter la face cachée de la création de l’Etat argentin, de révéler l’envers du discours officiel car la nation s’évertue à effacer toute l’histoire des peuples autochtones. L’histoire de l’Amérique du Sud est toujours racontée du côté des vainqueurs.

Qu’est-ce qui définit formellement la performance documentaire telle que vous la pratiquez ?

Txalo et moi sommes équipés de casques et nous redonnons sur scène la parole des Mapuches que nous avons rencontrés et enregistrés en Patagonie. Ce dispositif nous semblait le plus juste. N’étant pas nous-mêmes Mapuches, nous instaurons consciemment une distance avec notre sujet, sans chercher l’incarnation de personnages. Notre écriture est surtout basée sur des images comme un scénario de cinéma et non sur des émotions. Nous voulons laisser un espace de projection aux spectateurs à travers nos textes qui convoquent des images : le visage d’une femme, un espace… Et par les installations-paysages que nous construisons sur le plateau, où chacun est libre d’y voir ce qu’il veut.

Sur quel sujet porte la dernière partie de votre trilogie ?

Teatro Amazonas que le théâtre Garonne coproduit a pour thème l’Amazonie brésilienne. Sur ces terres, à Manaus, un des plus grands Opéra du Brésil a été construit à la fin du XIXe siècle, à l’époque de la « fièvre du caoutchouc ». Et en 2014, Manaus a inauguré le gigantesque stade de football qui a accueilli la Coupe du Monde. Nous avons mené nombre de recherches sur l’origine de ces deux monuments afin de raconter l’histoire des derniers siècles de l’Amazonie, le développement industriel de la région, les désirs de grandeurs de la bourgeoisie post-coloniale, la spoliation et les atrocités commises sur les peuples natifs, la déforestation… La question étant : pourquoi la jungle tropicale la plus étendue de la planète et abritant la plus grande diversité de tribus et de langues est-elle si convoitée par les explorateurs, voyageurs, colonisateurs et investisseurs étrangers ?

Le projet Pacifico est-il pour vous un moyen, en tant qu’artistes engagés, d’éveiller les consciences nationales et internationales ?

Oui, mais nous ne nous définissons pas comme activistes. Nous sommes plutôt dans la recherche. Nous voulons partager avec le public ces questions que nous nous posons sur l’Histoire et sur nous-mêmes, Européens. L’histoire coloniale est le socle de nos références culturelles et sociales et nous contribuons tous à participer à ce mouvement industriel et colonial. Notre trilogie Pacifico cherche à nous faire prendre conscience de cela. Pour Txalo, c’est différent. Ces recherches lui ont donné la distance nécessaire pour parler de son continent. Nos documentaires historiques sont durs mais ils n’empêchent pas la beauté, grâce à la musique et l’occupation de l’espace scénique. Nous voulons parler de la barbarie des événements mais aussi de la beauté de ces pays. Si nous représentons clairement les choses, nous n’oublions pas de produire de l’amour, malgré tout.

Propos recueillis par Sarah Authesserre

Tierras del sudPresse

« Le courage et l'engagement des artistes Txalo Toloza et Laida Azcona sont vraiment admirable, presque incroyable; dans l’intention d'expliquer et de dénoncer ce que les médias ignorent, manipulent ou déforment, ils ont créé une pièce documentaire qui allie parfaitement à la fois la performance  et la création audiovisuelle. Sans oublier la part d’activisme liée à la mise en scène de la lutte du peuple Mapuche. Les textes projetés à l'écran fournissent des données historiques et statistiques, tandis que le texte parlé permet au public de créer sa propre image mentale - par exemple, lorsque Txalo décrit l'attaque brutale de la police contre le Lof Lafken Winkul Mapu à la Villa Mascardi. Ils font aussi connaître et honorent, par la même occasion, des noms tels que Micaela Johana Colhuan, María Nahuel, Ivana Huenelaf ou Soraya Maicoño. La dimension visuelle  du spectacle, déconnectée du texte, est étroitement liée au paysage, comme le paysage filmé par une caméra fixe et projeté sur le fond de scène. Le vent donne du mouvement à l'image et nous rappelle le dynamisme et la force vitale de la nature… Les images créées sur scène via une série d'objets que les deux interprètes déplacent, assemblent et manipulent - sous la lumière abrupte et sublime d’Ana Rovira, et sur une bande originale de Juan Cristóbal Saavedra - nous transportent dans un univers très précis et concret. »

Ana Prieto Nadal, L’Apuntador Nuvol, octobre 2018

Tierras del sud

Pour en savoir plus sur les Mapuches :

Podcast de 30 minutes sur France Culture : Tout un monde / Mapuche les hommes - plantes

Reportage sur Médiapart, écrit par Jean-Mathieu Albertini en novembre 2019 : Dans un Chili en pleine ébullition, le peuple autochtone des Mapuches fait entendre sa voix
 

 

Tierras del sudGénérique

dramaturgie Txalo Toloza-Fernández
chorégraphie Laida Azkona Goñi
performeurs Laida Azkona Goñi et Txalo Toloza-Fernández
voix Sergio Alessandria, Agustina Basso, Conrado Parodi, Gerardo Ghioldi, Daniel Osovnikar, Sebastián Seifert, Rosalía Zanón et Marcela Imazio
assistant à la mise en scène Raquel Cors
création son Juan Cristóbal Saavedra
création lumière Ana Rovira
création audiovisuelle MiPrimerDrop
scénographie Juliana Acevedo et MiPrimerDrop
construction Lola Belles, Mariona Signes et RotorFab-Espai Erre
styling Sara Espinosa
coordination Leonardo Gamboa Caneo
sélection musicale Marcelo Pellejero
conception de la production Elclimamola
photographie Alessia Bombaci
avec la collaboration de Sònia Gómez, Maite Garvayo, Ángela Fernández, Fernando Sánchez, Orlando et Jaime Carriqueo
production et production déléguée théâtre Garonne - scène européenne, Toulouse