Fugue

Après Le Crocodile Trompeur, Le Goût du faux et autres chansons, retour de La Vie Brève, cofondée par Jeanne Candel avec Samuel Achache, à la mise en scène. La compagnie a la singularité de réunir pour chaque création une conjonction particulière de personnes, une constellation de talents multiples et de désirs tout autant. La complicité irradie du travail fondé sur l’improvisation. La liberté aussi, qui permet de glisser en une seule scène des sommets du burlesque jusqu’aux gouffres de la mélancolie. La bande aime se mettre en péril, intégrer l’imprévu, chercher l’accord et jouer désaccordés. C’est justement au cœur de Fugue qui lie théâtre et musique comme Le Crocodile Trompeur. On retrouve transplantée au Pôle Sud, une équipe de scientifiques établis dans un camp de fortune. Le temps est glacial, les corps emmitouflés comme des nounours, il neige sur le piano. Pourtant l’atmosphère est flottante, et si survivre est une préoccupation partagée, il y a de la place pour l’amour et même pour les morts qui emmerdent les vivants. La musique et le chant sont là, mais Fugue est moins l’application au théâtre de la figure musicale qu’un éloge de la fuite. Une fuite infusée de désirs dissonants où chacun poursuit l’autre. Charles Fourier envisageait des périodes d’harmonie universelle où la température des pôles équivaudrait à celle de la Côte d’Azur et qu’à ces moments précis, l’eau de mer aurait le goût de la limonade. Le théâtre est aussi une terre d’utopie. 

After Le Crocodile Trompeur, Le Goût du faux et autres chansons, this is the return of the company La Vie Brève, cofounded by Jeanne Candel with Samuel Achache as the stage director. The company possesses the unique ability of gathering, for each creation, a particular combination of people, a constellation of multiple talents and desires. The complicity radiates from their work based on improvisation. And on freedom, allowing them in just one scene to jump from the peak of burlesque to the abyss of melancholy. The gang enjoys putting themselves in jeopardy, integrating the unexpected, looking for the harmony and playing out of tune. This is precisely at the heart of Fugue, which binds together theatre and music like in Le Crocodile Trompeur. We meet at the South Pole a team of scientists established in a makeshift camp.The weather is freezing, bodies are swaddled like teddy bears, it’s snowing on the piano. However the atmosphere is light, and even if surviving is a shared preoccupation, there is space for love and even for ghosts to piss off the living. Music and singing are present, but Fugue is less the theatrical application of the musical figure, and more an apology of the escape (which is another meaning for « fugue » in French). An escape instilled with dissonant desires where everyone is chasing the other. Charles Fourier imagined periods of universal harmony, when the temperatures at the Poles would be equal to the ones on the Côte d’Azur, and that in those precise moments, seawater would taste like lemonade. The theatre is a land of utopia too.