Marta Izquierdo Muñoz

T’a-t-on déjà transmis une pièce chorégraphique ?

Oui, une fois pendant mes premières années en France en tant qu’interprète de Catherine Diverrès. Elle avait réalisé « Echo » pour le Festival international de danse de Cannes en 2003, un projet qui compilait des extraits de pièces de son répertoire. Pour moi, il s'agissait plutôt d'une sorte d’exercice, mais pour Catherine, c'était une façon de partager avec nous sa mémoire de chorégraphe. Comme interprète je n’avais pas pu mettre beaucoup de moi-même car il s’agissait de transmission chorégraphique pure, seulement basée sur le mouvement. Je m’étais déjà demandée quelle était la place de l’histoire personnelle dans cet exercice de la transmission.

Dans quel état d'esprit et de corps abordez-vous cet exercice ?

La proposition m’invite à travailler autour d’une thématique qui m’est chère, celle des personnes marginales, mais en l’abordant sous un angle différent du mien. C’est pour cela, qu’outre mon intérêt pour la personne qu’est Robyn, j’ai tout de suite été enthousiaste à l’idée de dialoguer avec une autre créatrice qui me déplace vers sa proposition et me permet d’explorer à partir d’un angle qui n’est pas celui que j’aurais choisi au départ. Ce que me propose Robyn, c’est une transmission au sens beaucoup plus large, beaucoup plus ouvert, une recréation à partir de ma propre histoire, réelle et fictive. C’est une façon de construire des projets qui se rapproche finalement assez de ce que je faisais dans mes tous premiers solos chorégraphiques, où je travaillais sur l’incarnation d’un personnage, de manière assez théâtrale. Sauf, qu’il y a ici une contrainte de départ plus forte qui est l’œuvre et l’histoire de Robyn. C’est aussi un accompagnement et un écrin artistique privilégié et le passage de relais d’une aînée, alors que lors de la dernière décennie, c’est plutôt moi qui ai transmis mon histoire et mon expérience à de nouvelles générations.
Je prends ce projet avec beaucoup de curiosité. J’étais excitée par l’idée de construire un protocole de rencontre et de commencer un dialogue tout d’abord entre deux femmes, puis de deux femmes artistes. J’aime quand je ne sais pas ce qui va se passer.

Lire la suite de l'entretien réalisé par Pauline Lattaque, décembre 2023