Stéphanie Fuster

"Souvent, on voudrait dissocier les mots et la danse alors que c’est le mariage parfait : on dit un mot et le geste prend sens. Ce sont eux qui m’ont permis de conscientiser ce que je faisais d’instinct, de mesurer combien cette danse était une métaphore de mon être interne – de celui de beaucoup de personnes, certainement."

Stéphanie Fuster

Quand Stéphanie Fuster parle de flamenco, elle pourrait sans doute y enrôler même les plus rétifs. Richesse des images, évidence des mots, sensibilité, sincérité, complexité. C’est que son histoire avec cette danse dont elle est « tombée follement amoureuse » à la fin de l’adolescence est passionnelle. « C’est devenu tout », se rappelle-t-elle en évoquant son travail d’alors avec Isabel Soler : l’exigence, la technique, les beaux textes. Ensuite, DEA de droit public en poche, c’est le départ pour Séville : les tablaos, les tournées, les maestros Israel Galván et Juan Carlos Lérida. « Cela pouvait paraître idéal de l’extérieur, mais j’étais un bloc de souffrance. Je n’ai pas aimé longtemps jouer à la danseuse. » Enfermée dans un flamenco d’effigie qui n’est pas le sien, elle revient après huit ans à Toulouse, où ses amis Pierre Rigal et Aurélien Bory créent avec cette même audace qu’elle sent en elle. Elle commence à déconstruire, explorer ce qui lui fait si mal dans cette danse qui l’habite, la fascine et qu’elle transmet avec ferveur dans sa Fábrica Flamenca (école de danse à Toulouse) et à travers ses spectacles en tant que chorégraphe et interprète. Le guitariste José Sanchez est un précieux allié en cela, ainsi qu’Aurélien Bory, qui écrit pour elle Questcequetudeviens? en 2008 : un portrait dansé retraçant son parcours, les contradictions qui l'étreignent et la façon dont l’émancipation qu’elle accomplit vis-à-vis de son art l’y enracine encore plus fort. Une profonde recherche par le mouvement et la pulsion, mais aussi l’imaginaire et les mots de la philosophie et la psychanalyse. « Cela fait vingt ans que j’écris en entier des spectacles imaginaires : finalement, ils coulent tous vers Gradiva. Elle charrie toute cette matière que j’ai traversée. Elle me dit, après tant d’années, fais juste quelque chose avec ce que tu es. »

Agathe Raybaud