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Quand, voici deux ans, Marion Siéfert imagine un spectacle pouvant être vu simultanément dans un théâtre et sur Instragram, elle ne sait pas encore à quel point le procédé – qui est alors pour elle une façon de confronter des formats et des regards différents – trouvera une si pertinente actualité. Ainsi, alors que les plateaux restent vides toute la saison passée, le spectacle continue de vivre par écrans interposés, jusqu’à être présenté en janvier dernier sur l’écran géant installé sur la façade du théâtre Sorano. Mais cette saison c’est sûr (?), Jeanne retrouve le chemin des salles, et la chaleur du public…D’abord farouche, puis de plus en plus échevelée, Jeanne est cette adolescente enfermée dans sa chambre qui, avec son téléphone portable pour seul confident, se raconte en mode selfie, jouant des cadrages, multipliant les effets : elle livre ses doutes, ses rêves et ses colères, met en scène des épisodes de sa vie, en invente d’autres, joue tous les personnages à la fois, et se construit au passage une foule d’identités chimériques – "avatars" du monde virtuel, ou "rôles" dans le monde de la scène, selon où l’on se place. Avec cette performance virtuose, l’actrice Helena de Laurens livre une percutante confession en roue libre, entre jeu de massacre débridé et irrésistible machine à fantasmes, chronique du quotidien et furieux conte épique. Et chemin faisant, face à ces spectateurs comme à ses followers, cette Jeanne-là révèle la troublante intimité que permet l’exposition sur les nouveaux médias, en même temps qu’elle sublime les prodiges que peut encore accomplir cet art parmi les plus anciens : le théâtre.

Le spectacle est aussi sur instagram, tous les soirs de représentation. (QR code à flasher ci-dessous)