Lia Rodrigues

Depuis la création de sa compagnie en 2004 dans la favela de Maré, à Rio de Janeiro, Lia Rodrigues développe des actions artistiques et pédagogiques qu’elle pilote au cœur de son quartier où elle a fondé, avec l’association Redes da Maré, le Centre des arts et l’École libre de danse. Son but : démocratiser l’accès à l’art pour tous ceux qui vivent en état de vulnérabilité. Elle présente cette saison à Garonne Encantado, une pièce née du désir d'utiliser la magie et l'incantation pour guider le processus créatif mis à mal durant la crise sanitaire qui a durement frappé le Brésil.

Votre pièce Encantado a été élaborée en pleine pandémie.
Comment la crise sanitaire traverse-telle cette nouvelle création ?

Quand nous nous sommes rencontré·es, les onze danseuses et danseurs et moi-même pour commencer à travailler vers avril-mai 2021, j'avais déjà rassemblé quelques images et textes depuis 2019. Pendant cette création, nous devions suivre des protocoles de distanciation et de port de masques, sans compter des tests hebdomadaires. Nous étions tous très préoccupé·es par l'énorme crise sanitaire que traversait – et que traverse encore – le Brésil. À ce moment-là, le centre d'art de Maré (favela de Rio) fonctionnait aussi comme un lieu de stockage de nourriture, de bouteilles d'eau, de produits d'hygiène et de nettoyage et d'équipements de protection individuelle distribués aux 17 000 familles de la région qui vivent dans une extrême pauvreté. Cette initiative était inscrite dans le cadre de la campagne « Maré dit NON au coronavirus ». Parallèlement aussi, des ouvriers changeaient notre toit et installaient l'énergie solaire dans le cadre de notre projet de transformation du centre d'art en bâtiment durable. Et un unique rideau de tissu nous séparait de toutes ces activités ! Nous étions dans une coexistence très intime. Je pense qu'Encantado a été traversé par tout cela. Je vois trois étapes dans cette création qui témoignent en quelque sorte des différents moments de la pandémie : celle où les artistes sont séparés et ne peuvent se toucher, une deuxième phase où ils commencent à former des duos, trios et quatuors et à la fin de la création, une fois tous vaccinés, lorsqu'ils forment une danse collective.

> Lire (ci-dessous) la suite de l'entretien mené par Sarah Authesserre